Atteinte à l'intégrité sexuelle

Atteinte à l'intégrité sexuelle

L’attentat à la pudeur se retrouvait dans l’ancien code pénal. Cependant, la réforme du Code pénal de juin 2022 a remplacé ce terme par « atteinte à l’intégrité sexuelle ».

C’est, selon nous, une excellente chose. Car ce qui est atteint par l’agression sexuelle n’est pas la pudeur mais bien l’intégrité de la personne. En l’occurrence, son intégrité sexuelle.

Ancienne définition de l’attentat à la pudeur

L’ancien article 372 du Code pénal punissait l’attentat à la pudeur commis sans violences ni menaces sur la personne ou à l’aide de la personne d’un.e enfant de l’un ou de l’autre sexe, âgé.e de moins de seize ans accomplis.

Il ajoutait encore que l’attentat à la pudeur commis, sans violences ni menaces, par tout.e ascendant.e ou adoptant.e sur la personne ou à l’aide de la personne d’un.e mineur.e, même âgé.e de seize ans accompli était encore plus sévèrement puni. En outre, il précisait que la sanction était la même si le coupable était soit le frère ou la soeur de la victime mineure ou toute personne qui occupe une position similaire au sein de la famille, soit toute personne cohabitant habituellement ou occasionnellement avec elle et qui a autorité sur elle.

Le terme était vaste. Il représentait des choses très variées allant de comportements relativement légers à des actes bien plus graves. Pensons, notamment, à des « massages » insistants sur différentes zones du corps, sans pénétration.

Dans ce cas, la victime mineure était présumée non consentant.e jusqu’à l’âge de 16 ans.

Lorsque cet acte était pratiqué par un parent proche, il s’agissait d’inceste. Et ce, même si le mot n’était jamais mentionné explicitement dans le Code Pénal.

Nouvelle définition de l’atteinte à l’intégrité sexuelle

Le Code pénal définit, dorénavant, l’atteinte à l’intégrité sexuelle. L’article 417/7 du nouveau Code pénal se trouve dans le chapitre concernant les infractions portant atteinte à l’intégrité sexuelle, au droit à l’autodétermination sexuelle et aux bonnes mœurs.

« L’atteinte à l’intégrité sexuelle consiste à accomplir un acte à caractère sexuel sur une personne qui n’y consent pas, avec ou sans l’aide d’un tiers qui n’y consent pas, ou à faire exécuter un acte à caractère sexuel par une personne qui n’y consent pas. Cette infraction est punie d’un emprisonnement de six mois à cinq ans.

Est assimilé à l’atteinte à l’intégrité sexuelle le fait de faire assister une personne qui n’y consent pas à des actes à caractère sexuel ou à des abus sexuels, même sans qu’elle doive y participer.

L’atteinte existe dès qu’il y a commencement d’exécution. » (Art. 417/7 nouveau du Code pénal)

Explications

Autrement dit, cette infraction concerne autant les actes à caractère sexuel non consentis commis sur la victime, que ceux imposés à la victime sur l’auteur ou un tiers, ou encore les actes commis par la victime sur elle-même sous la domination de l’auteur.

Dans le voyeurisme, il n’y a pas d’interactions entre la victime et l’auteur. A l’inverse, l’atteinte à l’intégrité sexuelle comprend aussi le fait de contraindre une personne à assister à des actes à caractère sexuel, en direct, même sans y participer, ou à distance.

La différence établie avec le viol consiste, quant à elle, en l’absence de pénétration.

Comme auparavant dans l’article 372, la menace et la violence ne sont pas obligatoires pour conclure à l’atteinte de l’intégrité sexuelle d’une personne.

Il est important de noter aussi que toute forme de tentative est sanctionnée par le biais du dernier alinéa de l’article. En effet, « L’atteinte existe dès qu’il y a commencement d’exécution » (Art. 417/7 nouveau du Code pénal).

Ça veut dire que l’auteur, s’il est conscient et volontaire de ses actes, doit seulement avoir l’intention de commettre les faits.

Une appellation adéquate, enfin

Attentat à la pudeur

Contrairement à l’attentat à la pudeur, l’atteinte à l’intégrité sexuelle dispose d’une définition claire. Celle-ci résonne avec beaucoup plus de sens.

En revanche, l’attentat à la pudeur n’a aucune réelle définition. En effet, il faut consulter la jurisprudence pour en comprendre les rouages.

Si on décompose les différents éléments, on obtient ce qui suit.

  • Un « attentat » qui consiste en « une tentative criminelle contre quelque chose » (Le Robert, s. d.-a) ;
  • La « pudeur » qui se définit comme « sentiment de honte, de gêne qu’une personne éprouve à faire, à envisager des choses de nature sexuelle ; disposition permanente à éprouver un tel sentiment » (Le Robert, s. d.-b).

Cela veut dire que l’attentat à la pudeur se comprend comme une tentative criminelle contre la gêne d’une personne à envisager des choses de nature sexuelle. Autant dire que cela ne fait pas beaucoup sens.

De plus, par le passé, on attribuait cette pudeur à l’honneur de la famille. Autrement dit, au patriarche, c’est-à-dire à l’homme à laquelle appartenait la victime (Vigarello, 2000).

Il y a donc, jusqu’en 2022, une pérennité du statut de la victime, le plus souvent des femmes, comme secondaire.  Le préjudice principal est alors celui fait au propriétaire de la victime, à savoir le père ou le mari. On considère ainsi que ce dommage comme plus important que celui perpétré contre la victime elle-même.

Atteinte à l’intégrité sexuelle

Maintenant, avec le nouvel article et la reformulation en « atteinte à l’intégrité sexuelle », la victime (la femme) récupère son autonomie sexuelle.

Changer les mentalités n’est pas facile. Mais il y a déjà une amélioration dans le droit ce qui est crucial.

Dans ce sens, le poids de la honte ne pèse plus sur les épaules des victimes. Or, celles-ci étaient, depuis longtemps, perçues comme responsables de leur situation.

De plus, cet article rompt tout lien avec l’honneur de l’homme. On reconnait enfin la violation et la souffrance subies par la victime.

En bref, on observe une amélioration avec la modification du Code pénal et l’instauration du nouvel article.

Cependant, les précédents et la doctrine concernant l’attentat à la pudeur restent toujours d’application pour l’atteinte à l’intégrité sexuelle (Service public federal Justice, s. d.).

Les circonstances aggravantes

Il existe plusieurs circonstances aggravantes applicables à l’atteinte de l’intégrité sexuelle. Une fait l’objet d’une peine pouvant aller de 20 à 30 ans, 5 allant de 15 à 20 ans, et 5 autres de 10 à 15 ans.

En général, les peines concernant des circonstances aggravantes ont augmenté avec la modification du Code pénal sexuel (Henrion, 2022).

20 à 30 ans

Art. 417/12 Si l’acte entraine la mort non voulue d’une personne.

La jurisprudence connait des cas tels que des suicides. Mais, il faut arriver à démontrer un lien de causalité entre l’agression et la mort de la victime.

Si l’on prouve, en outre, que l’auteur a eu l’intention de tuer sa victime, alors il sera jugé pour le chef d’accusation le plus important.

15 à 20 ans

Art. 417/13 Si l’acte est précédé ou accompagné d’une séquestration, comprise comme une détention. Ou de torture, définie à l’article 417bis du Code pénal. Ou encore de violences graves explicitée à l’article 400 du Code pénal.

Art. 417/14 Si l’acte est commis sous la menace d’une arme, au sens large, ou d’un objet y ressemblant.

Avec la réforme, les législateurs ont ajouté l’administration de substances inhibitives ou désinhibitives. A savoir des stupéfiants qui arrêtent ou ralentissent le mécanisme physiologique, ou à l’inverse empêchent la retenue de certaines réactions.   

Art.417/15 Si l’acte est commis sur une personne vulnérable, que cela soit manifeste ou connu de l’auteur. Une personne peut être vulnérable de par son âge, une grossesse, une maladie, un handicap physique ou mental.

Art.417/16 Si la victime a moins de moins de 16 ans.

Art.417/18 Si l’acte a un caractère incestueux, c’est-à-dire qu’il est commis sur un.e mineur.e par un parent en ligne direct ou en ligne collatérale jusqu’au 3e degré.

  • 1er degré : les parents
  • 2e degré : les grands-parents, les frères et sœurs
  • 3e degré : les oncles, tantes, arrière-grands-parents, neveux, nièces

Les cas d’adoption ou de parenté par alliance sont compris à chaque niveau dans ce cadre. Par exemple, l’agresseur peut être un parent adoptif. Il peut aussi s’agir du demi-frère de la victime.

10 à 15 ans

Art.417/17 Si la victime a plus de 16 ans mais toujours mineure.

Art.417/19 Si l’acte est commis par un parent ou allié.e en ligne directe ou collatérale jusqu’au 3e degré (explication des degrés dans la section « 15 à 20 ans » pour l’art. 417/18), ou par un.e partenaire.

Ce dernier/cette dernière est une personne avec qui la victime est/était mariée ou entretient/entretenait une « relation affective et physique intime durable » (Art. 417/19 nouveau du Code pénal).

Si la relation est terminée il faut un lien de causalité entre l’acte et la fin de l’union.

Précisons à cet égard que les partenaires ne doivent pas vivre ensemble pour que la circonstance aggravante s’applique.

Art. 417/20 Si l’acte est motivé par un biais discriminatoire concernant la race, l’orientation sexuelle, le sexe, la grossesse, etc. (Cf article pour toutes les dimensions).  

Cet article précise que la victime ne doit pas forcément valider les motifs discriminatoires qui ont motivés l’auteur. Par exemple, si l’auteur commet un acte à caractère sexuel non consenti car il pense que la victime est homosexuelle mais qu’en fait elle ne l’est pas, la circonstance aggravante s’applique quand même. De plus, il en va de même si l’agresseur agit contre la victime car elle a un lien tangible ou supposé avec une personne envers laquelle il entretient de la haine, du mépris ou de l’hostilité à cause de motifs discriminatoires.

Art. 417/21 Si l’acte est commis par une personne de confiance, d’autorité ou d’influence pour la victime.

Art. 417/22 Si l’acte est commis avec l’aide ou en présence d’une ou de plusieurs personnes.

 

Louise Colige et Miriam Ben Jattou

 

Références juridiques

  • Code pénal : articles 417/7 et suiv.

Pour aller plus loin

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