Toucher vaginal
Lors d’un examen médical, un.e soignant.e peut pratiquer un toucher vaginal sur sa patient.e. Le présent article revient sur cette pratique. Et nous développons également la question des touchers vaginaux non consentis.

On dénonce de plus en plus les violences gynécologiques et obstétricales ces dernières années.
Beaucoup ont en effet témoigné sur les réseaux sociaux à propos de violences et négligences subies par un.e soignant.e.
Pourtant, il existe encore aujourd’hui un tabou sur ces comportements. Le travail de sensibilisation n’est en effet pas assez important.
De nombreuses personnes sont encore victimes de violences de la part de professionnel.le.s de santé mal informé.e.s ou mal intentionné.e.s. Et elles sont souvent trop peu écoutées.
Il est ainsi important de ne pas banaliser ces traitements.
En effet, votre consentement est toujours primordial avant et pendant les examens.
Et n’importe quelle négligence, menace ou chantage n’est pas acceptable quand bien même cela vient de votre médecin.
Nous pouvons montrer une preuve de l’absence de reconnaissance des violences gynécologiques. Ainsi, il n’existe pas de définition officielle acceptée par tou.te.s.
De même, on connait peu les conséquences de ces traitements.
De manière large, les violences gynécologiques regroupent tous les comportements inappropriés en matière de soins gynécologiques et de santé sexuelle.
Ces violences peuvent donc être verbales (comme une parole inappropriée) ou physiques (un défaut de consentement).
On pourrait ainsi les diviser en 4 types :
- les négligences,
- les violences verbales,
- les violences physiques et
- les violences sexuelles.
En outre, le toucher vaginal non-consenti constitue une violence sexuelle.
Pour plus d’informations, n’hésitez pas à aller voir notre page sur les violences gynécologiques et obstétricales.
I. Le toucher vaginal
a) Qu’est-ce que le toucher vaginal ?
Le toucher vaginal est un examen médical.
Il consiste à vérifier s’il y a un problème au niveau des organes sexuels féminins. Par exemple, il permet de voir le positionnement ou la taille de l’utérus.
Il consiste le plus souvent à introduire deux doigts dans le vagin. Ainsi, le/la soignant.e palpe les parois du vagin puis le col de l’utérus.
b) Qui peut pratiquer un toucher vaginal ?
Le toucher vaginal est pratiqué par un.e médecin généraliste, un.e gynécologue, un.e sage-femme ou un.e obstétricien.ne.
- Un.e gynécologue est un.e médecin spécialisé.e dans la santé gynécologique. Il/elle traite les différentes maladies et problématiques liées à l’appareil génital ainsi qu’aux troubles hormonaux.
- Un.e sage-femme assure le suivi médical des personnes enceintes pendant la grossesse et après la naissance. Il/elle prend en charge les grossesses qui ne comportent pas de risque particulier.
- Un.e obstétricien.ne est un.e médecin spécialisé.e dans le suivi des grossesses et accouchements. Contrairement aux sages-femmes, il/elle peut gérer les situations à risques et réaliser des actes chirurgicaux comme une césarienne.
c) Les devoirs des soignants.es
Le Code de déontologie médicale définit des principes éthiques et moraux nécessaires pour encadrer la pratique des soignants.es.
Il interdit notamment une pratique inhumaine ou dégradante envers les patient.e.s (article 30).
Ainsi, plusieurs obligations découlent de ce code.
Tout d’abord le/la soignant.e a une obligation d’information. C’est-à-dire qu’il/elle doit informer le/la patient.e sur son état de santé et les traitements envisagés afin d’obtenir son consentement.
Ce consentement doit être libre et éclairé. Cela implique que le/la patient.e le donne sans pression extérieure et avec une compréhension des enjeux de l’examen/traitement. En cas d’incapacité du/de la patient.e, le/la soignant.e doit prodiguer les soins dans son intérêt.
Ensuite, les soignants.e.s doivent respecter les principes fondamentaux d’éthique.
Ils/elles doivent ainsi faire preuve de bienfaisance. C’est-à-dire qu’ils/elles doivent agir dans l’intérêt du/de la patient.e en évitant de lui causer du tort.
Le/la soignant.e doit aussi respecter l’autonomie du/de la patient.e, qui a le droit de décider pour sa propre santé.
Il/elle doit également garantir un accès aux soins sans discrimination, conformément au principe de justice et d’équité.
De plus, le Code de déontologie prévoit une différence entre l’erreur médical et la faute professionnelle.
- L’erreur médicale est involontaire. Elle peut être liée à une difficulté pendant le diagnostic par exemple.
- La faute professionnelle implique la violation d’une règle du code de déontologie. Le/la soignant.e peut avoir des sanctions disciplinaires : avertissement, censure, suspension, radiation de l’Ordre des médecins. Il/elle peut également être tenu.e responsable civilement ou pénalement. Il peut s’agir d’un manque de sérieux, d’une négligence ou d’un non-respect des droits des patient.e.s comme son consentement notamment. Malheureusement, les poursuites finissent souvent par un classement sans suite ou un acquittement.
d) Le droit du/de la patient.e : le consentement à l’examen médical
Nous l’avons dit précédemment, le consentement médical constitue un droit essentiel.
La loi du 22 août 2002 (article 8) relative aux droits des patient.e.s établit que le/la patient.e a le droit de consentir librement à toute intervention du/de la soignant.e.
Dès lors, il/elle doit informer le/la patient.e sur l’objectif, la procédure, les risques, l’urgence et les alternatives de l’examen ou de l’intervention médicale.
Le consentement du/de la patient.e pour un examen doit être donné expressément. Cela signifie que le/la patient.e doit donner son accord de manière évidente. Cela peut se faire soit par une signature (manuscrite ou électronique), soit en le disant de manière explicite. Ce consentement doit être libre et éclairé.
Cependant, le/la patient.e a toujours le droit de refuser une intervention ou de retirer son consentement à tout moment.
Le/la patient.e peut aussi exiger que son refus soit mis par écrit.
II. Le droit pénal applicable
a) La définition du consentement
Depuis 2022, le Code pénal définit lui aussi le consentement.
Selon l’article 417/5 du code pénal :
« Le consentement suppose que celui-ci a été donné librement. Ceci est apprécié au regard des circonstances de l’affaire. Le consentement ne peut pas être déduit de la simple absence de résistance de la victime. Le consentement peut être retiré à tout moment avant ou pendant l’acte à caractère sexuel.
Il n’y a pas de consentement lorsque l’acte à caractère sexuel a été commis en profitant de la situation de vulnérabilité de la victime due notamment à un état de peur, à l’influence de l’alcool, de stupéfiants, de substances psychotropes ou de toute autre substance ayant un effet similaire, à une maladie ou à une situation de handicap, altérant le libre arbitre.
En tout état de cause, il n’y a pas de consentement si l’acte à caractère sexuel résulte d’une menace, de violences physiques ou psychologiques, d’une contrainte, d’une surprise, d’une ruse ou de tout autre comportement punissable.
En tout état de cause, il n’y a pas de consentement lorsque l’acte à caractère sexuel a été commis au préjudice d’une victime inconsciente ou endormie. »
Ainsi, votre consentement pour tout acte à caractère sexuel doit avoir été donné librement. C’est-à-dire sans contrainte, menace, ruse par exemple.
Encore une fois, vous avez le droit de retirer votre consentement à tout moment.
Aussi, personne ne peut déduire que vous êtes consentant.e du seul fait que vous ne résistez pas.
b) La définition du viol
Le Code pénal belge qualifie le viol comme un crime. En effet, la réforme du 1er juin 2022 a permis de redéfinir les notions de viol, de consentement et d’atteinte à l’intégrité physique.
Selon l’article 417/11 du Code pénal :
« On entend par viol tout acte qui consiste en, ou se compose, d’une pénétration sexuelle de quelque nature et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne ou avec l’aide d’une personne qui n’y consent pas »
Ainsi, le viol désigne tout acte de pénétration par n’importe quel moyen. Il peut donc s’agir du pénis, d’objets ou bien de doigts par exemple.
Cette définition s’applique peu importe le lien entre l’auteur.e du crime et la victime, y compris s’il s’agit d’un.e professionnel.le médical.e.
Le Code pénal prévoit une peine de réclusion de 10 à 15 ans de prison. Cependant, cette peine peut s’allonger en cas de circonstances aggravantes. Par exemple, si la loi considère une victime spécifique de violence sexuelle comme une personne vulnérable, il y a circonstance aggravante. L’auteur.e de ce viol aura donc une peine plus longue.
C’est d’ailleurs le cas pour une victime enceinte.
De plus, un acte à caractère sexuel non-consenti infligé par un.e professionnel.le de santé constitue également une circonstance aggravante.
III. Le toucher vaginal non-consenti est-il un viol ?
a) Le caractère sexuel de l’examen
Pour Femmes de Droit, le toucher vaginal non-consenti constitue par définition un viol.
En effet, introduire ses doigts dans un vagin est une pénétration sexuelle.
Le toucher vaginal devient donc illégal s’il s’effectue sans le consentement du/de la patient.e préalablement informé.e.
Cependant, certain.e.s professionnel.le.s de santé amènent l’argument que le toucher vaginal n’a « rien de sexuel ». Selon elles/eux, il s’agit d’un acte purement médical auquel ils/elles ne prennent aucun plaisir.
Néanmoins, si nous revenons au texte du code pénal, nous voyons bien que le plaisir n’est pas un élément pris en compte dans la définition du viol.
Autrement dit, peu importe que le/la soignant.e ait éprouvé du plaisir ou non, un toucher vaginal non consenti reste un viol, selon nous.
De plus, la question de sexualité ou non de l’acte n’a pas lieu d’être. En effet, on oublie trop souvent la dimension humaine. Pour la personne, le toucher vaginal reste une pénétration sexuelle. Car le vagin n’est pas un objet. Le/la patient.e ressent donc pleinement le geste médical pratiqué.
Même si le/la médecin ne lui trouve pas de caractère sexuel, le/la patient.e peut légitimement le percevoir ainsi.
Dès lors, dire que le toucher vaginal est un acte purement médical revient à imposer la vision du/de la médecin à la femme, une conception purement patriarcale.
Sans oublier que la cause de la plupart des violences sexuelles renvoie à la volonté de dominer plus qu’au plaisir sexuel de l’auteur.e.
b) L’impact sur les victimes d’un toucher vaginal non consenti
Nous l’avons dit, selon nous, le toucher vaginal non-consenti est un viol. Il entraîne ainsi des conséquences désastreuses sur les victimes.
Un viol a de lourdes conséquences physiques (douleurs, troubles digestifs, fatigue,..), psychologiques (anxiété, stress post-traumatiques,..) et morales. La victime ressent des émotions négatives très intenses : peur, dégout, honte, perte d’estime de soi, etc. La souffrance physique et morale mène souvent à l’isolement.
L’accompagnement psychologique des victimes se révèle alors plus que nécessaire afin de limiter ces sentiments.
Le viol peut aller jusqu’à entrainer des addictions, des automutilations et des suicides. Il ne faut pas minimiser ses effets. (Pour plus d’informations, voir notre page sur le viol et ses conséquences)
D’autre part, votre médecin est supposé.e être quelqu’un.e en qui vous pouvez avoir confiance. En commettant un viol par un toucher vaginal non-consenti, il/elle brise ce lien.
Dans ce genre de situation, la victime peut alors développer une méfiance envers les soignant.es. Cela peut entraîner anxiété et stress face aux soins. Par peur, elle risque d’éviter les consultations médicales. Elle compromet ainsi sa santé et aggrave d’éventuels problèmes graves.
Ce traumatisme représente donc un danger majeur pour les victimes.
Conclusion
Femmes de Droit lutte pour le respect des soignant.e.s et des patient.e.s.
En l’occurrence, il s’agit de ne pas banaliser un acte « banal » pour les soignant.e.s mais qui peut constituer une violence importante pour les patient.e.s.
Dès lors, il faut continuer à conscientiser les soignant.e.s sur l’importance du consentement. Et par conséquent, de l’information de leurs patient.e.s tout au long de la prise en charge médicale.
En outre, les patient.e.s victimes ont besoin d’espaces adéquats pour parler des violences subies et obtenir réparation.
Mina Vantourout
Références juridiques
- Loi du 22 août 2002 relative aux droits des patient.e.s
- Le Code pénal
- Le Code de déontologie médicale
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