La lesbophobie fait référence à une double discrimination vécue par les femmes lesbiennes : l’homophobie et le sexisme.
Avant de rentrer dans le vif du sujet et d’expliquer les différents mécanismes de la lesbophobie, un point vocabulaire s’impose.
Au sein de la communauté lesbienne, différents termes existent. Ils ne sont pas vraiment connu du grand public.
Certain.e.s diront que ces mots enferment les femmes lesbiennes dans des cases. Cependant, nombreuses de ces femmes utilisent ce vocabulaire comme un jeu. Cela leur permet d’avoir une culture commune souvent méconnue des personnes hétérosexuelles.
Quoi qu’il en soit cela fait partie de la culture lesbienne. Par conséquent, il est intéressant d’en découvrir les termes sans jugement.
La femme lesbienne butch est une femme utilisant des codes masculins, en particulier dans son attitude et son habillement. On parle aussi de soft butch pour parler des femmes lesbiennes qui ont un style et un comportement moins prononcés que les butchs.
La femme lesbienne androgyne est une femme qui présente des aspects communs aux deux genres binaires (homme et femme).
(mot créé par les américain.e.s à partir de « femme » en français)
Les femmes lesbiennes fems sont des femmes usant des codes de la féminité. Leur port éventuel de rouge à lèvre leur a valu également l’appellation de « lipstics ».
«L’expression lesbienne lipstick est une expression issue de l’anglais désignant une femme lesbienne qui adopte des attributs genrés dits féminins. Ces femmes peuvent porter par exemple du maquillage (d’où « lipstick » qui signifie « rouge à lèvres »), des robes et des jupes ou encore d’autres caractéristiques associées aux femmes. Dans le langage courant, le terme lesbienne lipstick est également utilisé pour caractériser l’expression de genre féminine des femmes bisexuelles qui s’intéressent de façon romantique ou sexuelle à d’autres femmes dites féminines. » (wikipédia).
On parle aussi de High fem pour parler des femmes performant de façon encore plus prononcée les codes de la féminité que les fems.
Ce terme désigne les lesbiennes mélangeant les codes des butchs et des fems.
Maintenant que les termes de base sont posés, nous allons voir plus précisément ce qu’est la lesbophobie.
Le terme lesbophobie est apparu en 1998. Les militantes de la CLF (Coordination lesbienne en France) l’ont utilisé afin de mettre en lumière le fait que les femmes lesbiennes étaient souvent oubliées par le militantisme LGBT.
Il y a, en effet, un grand manque de visibilité sur ces dernières. Les médias qui parlent de la thématique LGBT vont plutôt s’adresser aux hommes gays. Ainsi, dans ce domaine aussi les femmes sont confrontées au sexisme.
Dans le langage courant, quand on emploie les termes « homophobie » et « homosexuel », on pense implicitement à la « gayphobie » et aux hommes gays. Il était donc nécessaire d’avoir un terme qui soit propre aux femmes.
Par ailleurs, ce terme compte souligner le fait que les femmes lesbiennes sont victimes d’une double discrimination : étant homosexuelles et femmes, elles sont victimes d’homophobie et de sexisme.
Ce terme est d’autant plus important qu’il est temps de créer une culture lesbienne afin que les femmes puissent évoluer dans un monde où elles ne sont plus invisibilisées. Les hétérosexuel.le.s ne connaissent que très peu de choses sur la culture lesbienne et son histoire . Cependant, les femmes lesbiennes non plus car cela n’a jamais été mis en avant dans le militantisme LGBT. En effet, dans les médias, on ne retrouve que très peu d’informations sur le sujet contrairement à la culture gay masculine.
L’enquête très complète sur la lesbophobie menée par SOS homophobie en 2003 permettra d’appuyer les propos de cet article. En effet, cette association a voulu mesurer l’ampleur réelle de la lesbophobie afin de visibiliser ce phénomène.
L’association est partie d’un constat simple : les femmes lesbiennes témoignent beaucoup moins que les hommes gays.
Sur sa ligne d’écoute, l’association ne comptabilisait, depuis 1994, qu’en moyenne un appel sur cinq de la part d’une femme lesbienne. La question était donc de savoir si la lesbophobie était un phénomène marginal ou alors invisibilisé.
Les résultats de cette enquête, publiée en 2008, sont probants : 57 % des 1793 femmes qui ont participé à l’enquête ont répondu « oui » à la première question « Avez-vous été victime de lesbophobie ? ». Et 63 % ont déclaré avoir vécu au moins un fait lesbophobe au cours de leur vie.
Par ailleurs, cette étude nous éclaire sur les différents contextes où ont lieux les actes lesbophobes. Sur les 1793 témoignages :
Ainsi cette étude a dévoilé au grand jour la réalité et l’ampleur du phénomène. Les femmes lesbiennes sont victimes de lesbophobie et plus particulièrement dans la rue et au sein de leur famille. De plus, cela a des conséquences délétères dans leur vie.
En effet, sur les 1793 témoignages :
La lesbophobie est donc un phénomène grave qui peut être douloureusement vécu et qu’il est important de visibiliser. Il est temps que les femmes lesbiennes ne se sentent plus seules mais soutenues par leur communauté, leur famille, leurs ami.e.s ou encore l’Etat et la justice.
Les femmes lesbiennes subissent de nombreux préjugés quant à leur sexualité. Ces préjugés sont cependant très paradoxaux entre eux.
D’une part, les femmes lesbiennes sont hyper sexualisées car il y a ce phantasme hétérosexuel, influencé par les films pornographiques hétérosexuels, du « plan à trois ». En discothèque, dans les films et séries ou encore dans la rue, de nombreux couples lesbiens subissent ce préjugé. Nombreuses d’entre elles reçoivent des réflexions déplacées de la part d’hommes.
Mais d’autre part, elles sont souvent désexualisées. En effet, lors de leurs rapports sexuels, il n’y a pas de pénétration avec un pénis. Or, dans une société hyper hétéronormée et phallocentrée, cela est impensable. Pourtant, il ne manque pas d’études sur le sujet qui montrent que les femmes lesbiennes sont très épanouies sexuellement. Par exemple, une étude américaine sur le sujet montre que 86 % des femmes lesbiennes atteignent l’orgasme durant leur rapport sexuel contre 65% chez les femmes hétérosexuelles. En effet, parmi les femmes interrogées seules un tiers d’entre elles jouissent après un rapport uniquement vaginal. Finalement, ce n’est peut-être pas le pénis qui donne le plus de plaisir… A méditer !
Le stéréotype de la femme lesbienne est en général la femme butch. Pourtant c’est celle qu’on voit le moins dans les médias et dans les films et séries. En effet, à la TV, on va, en général, représenter les femmes lesbiennes par et pour le regard masculin, en accord avec le phantasme hétérosexuel des hommes.
Quand on sait que la majorité des réalisateur.rice.s sont des réalisateurs cela n’est plus très étonnant.
La femme butch est moins représentée car c’est celle qui correspond le moins à ce que « doit » être une femme selon les clichés et les injonctions sociales. De plus, elle ne dépend pas du regard masculin ce qui est très dérangeant dans une société patriarcale.
Au quotidien, c’est surement plus simple pour les fems malgré le fait qu’elles subissent elles aussi des réflexions… Cependant, au sein de la communauté lesbienne, elles ont un peu plus de mal à faire leur place. Certaines regrettent de ne pas se faire draguer car on ne remarque pas forcément qu’elles sont lesbiennes.
En général, la femme au cinéma est la petite copine du héros. Les réalisateur.rice.s étant majoritairement des hommes, ils ne parlent que de ce qu’ils connaissent. Cependant certains films abordent le sujet :
Il en existe d’autres que vous pouvez retrouver sur ce site.
La chanson française aborde aussi le sujet de l’amour lesbien. Et voici de brillantes femmes qui le chantent :
En conclusion, il est important de rappeler que les femmes sont libres de leur corps et de leur sexualité. Il y a autant de femmes lesbiennes que de manière de les représenter, alors évitons les clichés et les stéréotypes ! Et vive l’amour !
Fanny COUTELLER
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