Écart salarial en Belgique : pourquoi les femmes gagnent moins ?

Ecart salarial

En Belgique, les femmes continuent à gagner moins que les hommes. Et ce, malgré des lois qui visent à garantir l’égalité entre les genres.

Cet écart de salaire ne vient pas de nulle part. Au contraire, il est lié à des idées reçues sur les rôles des femmes et des choix de carrière.

Par ailleurs, les méthodes actuelles de calcul des salaires ne tiennent pas compte de certaines inégalités. Cela concerne celles liées à la répartition des tâches, au temps partiel ou à la sous-représentation des femmes dans les postes à responsabilités.

Malgré quelques progrès, ces inégalités salariales restent très présentes.

C’est pourquoi, en 2012, l’État belge à adopter une loi visant à renforcer la transparence salariale. En principe, cette initiative permet de mieux identifier les écarts de rémunération. Elle sert aussi à voir les mécanismes structurels à l’origine de ces inégalités afin d’y remédier de manière durable.

1.    Qu’est-ce que l’écart salarial ?

L’écart salarial désigne la différence entre le salaire moyen des femmes et celui des hommes.

L’écart salarial en Belgique

En Belgique, selon Statbel, cet écart atteignait 0,7 % par heure travaillée en 2023. Autrement dit, pour une même heure de travail, les femmes gagnaient en moyenne 0,7 % de moins que les hommes.

À première vue, ce chiffre semble faible. D’ailleurs, il reste bien en dessous de la moyenne européenne. En effet, les femmes touchent environ 12 % de moins que les hommes en Europe.

Grâce à ce résultat, la Belgique figure souvent parmi les « bons élèves » de l’Union européenne en matière d’égalité salariale.

Le calcul de l’écart salarial

Mais cette réussite cache une réalité plus complexe. En effet, cette statistique repose sur une méthode qui ne tient pas compte du nombre réel d’heures travaillées.

Par exemple, dans l’enseignement, seules les heures de cours sont prises en compte. Pourtant, les enseignant.e.s préparent leurs leçons et corrigent des copies en dehors des heures de classe. Et comme ce secteur emploie majoritairement des femmes, cet oubli fausse les résultats.

En ajustant ce calcul, l’écart salarial grimpe à 7 %. Et si l’on utilise les données de l’ONSS, l’écart atteint 19,9 %.

L’égalité salariale reste un objectif à atteindre

Ces chiffres montrent que l’égalité salariale reste un objectif à atteindre. Car, sous des moyennes rassurantes, des inégalités structurelles persistent.

En effet, même à travail égal, les femmes ne perçoivent pas toujours le même salaire.

Pourquoi ? Parce qu’elles sont moins nombreuses à occuper des postes de direction. Parce qu’elles travaillent plus souvent dans des secteurs peu valorisés comme les soins, l’enseignement ou le nettoyage. Or, ces métiers, pourtant essentiels, sont sous-payés.

Par ailleurs, de nombreuses femmes travaillent à temps partiel. Certaines le choisissent. D’autres y sont contraintes, à cause de l’organisation du travail ou des charges familiales. Ainsi, sur l’ensemble d’une carrière, ces facteurs creusent un écart salarial important.

2.    Des exemples concrets d’écart salarial

Au sein d’un supermarché

Prenons un exemple concret dans un supermarché. Une femme et un homme occupent le même poste. Ils sont tous les deux responsables de rayon.

À première vue, on imagine qu’ils touchent le même salaire. Pourtant, dans la réalité, leur rémunération peut différer.

Pourquoi ? Parce que l’homme gère un rayon considéré comme plus rentable (l’électronique ou les produits frais). De son côté, la femme supervise un rayon perçu comme moins lucratif (les produits d’entretien ou la papeterie).

Cette différence de secteur devient alors un prétexte pour mieux payer l’un que l’autre. Et cela, même si la charge de travail et les responsabilités sont similaires.

Dans le secteur de la finance

Un autre exemple apparaît dans des secteurs comme la finance ou les technologies. Là, une partie du salaire dépend de la négociation individuelle.

Or, les femmes négocient moins. Souvent, personne ne les y encourage. Parfois, elles n’y pensent même pas, faute de modèles. Et quand elles osent, elles prennent un risque. Car une femme perçue comme trop insistante peut être jugée négativement. Elle heurte alors les normes sociales, qui associent les femmes à la discrétion, à la douceur ou à la modestie.

Ainsi, la pression sociale agit comme un frein. Elle décourage les femmes à demander une juste rémunération. Et ce frein contribue à maintenir les écarts salariaux.

Y a-t-il une volonté de discriminer ?

Non. D’ailleurs, ce qui frappe, c’est que ces inégalités ne reposent pas toujours sur une volonté de discriminer.

Bien souvent, ce sont les règles en place. Des habitudes et des stéréotypes de genre les entretiennent.

Cela montre que l’égalité salariale ne dépend pas uniquement des lois ou des intentions. Elle exige des actions concrètes, des pratiques justes, et un changement profond des mentalités.

3.    Que dit la loi du 22 avril 2012 ?

Pour réduire les inégalités salariales entre les femmes et les hommes, la loi du 22 avril 2012 impose des obligations précises aux entreprises. Son objectif est de rendre les écarts de salaire visibles. Et, surtout, encourager des pratiques plus justes et plus équitables.

Concrètement, les entreprises de plus de 50 employé.e.s doivent rédiger un rapport sur les rémunérations tous les deux ans. Ce rapport distingue les salaires des femmes et ceux des hommes. Ainsi, il devient plus facile de repérer les inégalités.

Ensuite, chaque conseil d’entreprise doit désigner une personne référente pour l’égalité salariale. Ce médiateur/cette médiatrice veille au respect des principes d’égalité. Et, en cas de déséquilibre, il/elle doit intervenir.

Autre point essentiel : les entreprises doivent comparer les postes. Deux emplois de valeur équivalente (compétences, responsabilités…) doivent être rémunérés de manière égale. Et cela, peu importe le genre de la personne qui les occupe.

Enfin, si un écart de salaire apparaît sans justification claire, l’entreprise doit obligatoirement en analyser les causes. Cela l’empêche de se cacher derrière des habitudes, des approximations ou des stéréotypes.

Grâce à cette loi, les inégalités ne peuvent plus passer inaperçues. Les entreprises doivent maintenant s’expliquer, se remettre en question et, surtout, agir concrètement pour garantir l’égalité salariale.

4.    Mais la loi suffit-elle pour réduire l’écart salarial ?

La loi marque une avancée importante dans la lutte contre les inégalités salariales. Seulement, son application reste inégale. En théorie, elle impose des obligations claires aux entreprises. Mais dans la pratique, certaines ne respectent pas les règles.

Par exemple, plusieurs entreprises ne rédigent pas les rapports exigés. D’autres les rendent volontairement difficiles à comprendre. Parfois, ces documents ne sont même pas transmis aux représentant.e.s du personnel ou aux employé.e.s. Ainsi, cela limite leur utilité.

Et lorsque les entreprises ne se conforment pas à la loi, les sanctions ne suivent pas toujours. Malheureusement, ce manque de contrôle affaiblit l’impact de la loi. Il permet aussi à certaines inégalités de persister sans conséquence.

Un autre frein est le manque d’information. Beaucoup de femmes ignorent qu’elles ont le droit, légalement, d’être payées au même niveau que leurs collègues masculins pour un poste équivalent. Or, sans connaissance des droits, impossible de les faire valoir.

Même lorsque les employé.e.s sont informé.e.s, elles/ils n’ont pas toujours accès aux chiffres réels. Et sans données précises, il devient difficile d’identifier une inégalité.

En l’absence de transparence, les écarts peuvent se cacher facilement derrière des justifications floues. Cela empêche les femmes de défendre leurs droits ou de demander des corrections légitimes.

Pourtant, l’égalité salariale ne relève pas d’un geste de bonne volonté. C’est un droit fondamental. Et ce droit mérite d’être respecté, contrôlé et revendiqué.

5.    L’importance de cette loi pour les femmes

La fragilisation des femmes créée par l’écart salarial

L’écart salarial entre les femmes et les hommes a des conséquences profondes et durables. Chaque mois, les femmes gagnent en moyenne moins que leurs collègues masculins.

Ce décalage n’est pas anodin. En effet, il réduit leur capacité à épargner, à investir ou à faire face aux imprévus. Ce manque de marge financière fragilise leur autonomie tout au long de la vie.

Avec le temps, ces inégalités s’aggravent. En effet, en fin de carrière, les conséquences deviennent encore plus lourdes. Des salaires plus bas entraînent des pensions plus faibles.

Ainsi, de nombreuses femmes pensionnées vivent avec des revenus très limités. Le risque de précarité, voire de pauvreté, reste donc plus élevé chez elles. Cette réalité touche des millions de personnes âgées.

La hiérarchie entre les femmes et les hommes

Mais l’écart salarial ne se résume pas à une question d’argent. Il reflète aussi une hiérarchie implicite dans le monde du travail. Une hiérarchie où les femmes restent trop souvent reléguées au second plan.

On les perçoit comme moins compétentes, moins légitimes, moins dignes d’un salaire juste.

Ces écarts révèlent des stéréotypes sexistes et des normes de genre profondément ancrées.

L’importance de la pensée féministe

C’est là que la pensée féministe devient essentielle. Le féminisme ne se contente pas de dénoncer. Il propose de transformer une société qui, souvent sans s’en rendre compte, reproduit les inégalités.

Or, lutter contre les écarts de salaire, c’est remettre en cause des structures historiques. Mais c’est aussi questionner nos manières de recruter, d’évaluer et de rémunérer.

Corriger ces inégalités, ce n’est pas offrir un « bonus » aux femmes. C’est rétablir une justice. C’est reconnaître que l’égalité salariale est un droit, pas une faveur. Et plus largement, c’est avancer vers une société plus juste. Une société où chacun.e a les mêmes chances d’être reconnu.e et rémunéré.e. Et ce, quel que soit son genre.

Le combat féministe pour l’égalité économique est donc un combat pour la dignité. Un combat pour l’autonomie. Et surtout, un combat pour la justice sociale. Il nous concerne toutes et tous.

Maëlle Hornberger

Ressources

Cliquez sur le lien suivant pour la version PDF de cet article : 2025.06.23_Ecart salarial

Références juridiques

Loi du 22 avril 2012 visant à lutter contre l’écart salarial

 

Pour aller plus loin

L’égalité salariale ne doit plus rester une promesse. Elle doit devenir une réalité. Les lois existent. Mais seules, elles ne suffisent pas. C’est en s’informant, en échangeant, en agissant ensemble que les choses changent vraiment.

À toutes les femmes : prenez un moment pour réfléchir à votre situation. Avez-vous les mêmes conditions que vos collègues masculins ? Êtes-vous rémunérée à la hauteur de vos compétences, votre expérience, votre charge de travail ?

Pour faire le point, connaître vos droits et passer à l’action, plusieurs ressources sont là pour vous :

S’interroger, c’est déjà un pas. Et en parler, c’est faire avancer l’égalité pour toutes et tous.

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