Europe et droits des femmes
A travers le présent article, nous allons aborder les mécanismes de protection des droits des femmes en Europe.
Quelques définitions
On entend régulièrement que les institutions européennes prennent de plus en plus de place dans les politiques publiques nationales.
Mais quel rôle jouent ces institutions dans la mise en place de mesure en faveur des droits des femmes ?
Les deux institutions européennes principales sont le Conseil de l’Europe et l’Union européenne. Voici une petite description du rôle de ces deux institutions.
Le Conseil de l’Europe
Le Conseil de l’Europe est une organisation internationale. Celle-ci regroupe 46 pays européens.
Le Conseil de l’Europe travaille à promouvoir les droits humains, la démocratie et l’État de droit sur le continent. Il est notamment connu pour avoir créé la Convention européenne des droits humains. Ce dernier protège les droits fondamentaux des citoyennes et des citoyens en Europe.
La Cour européenne des droits humains se représente souvent avec le sigle CEDH ou se dénomme simplement « la Cour ». Il s’agit, en quelque sorte, du tribunal lié au Conseil de l’Europe.
La Cour veille au respect de la Convention européenne des droits humains.
Ainsi, si une personne estime que ses droits ont été transgressés et qu’elle n’a pas obtenu justice dans son propre pays, elle peut porter son affaire devant la CEDH.
Dans ce cas, la Cour rend des décisions que les États concernés doivent respecter.
L’Union européenne
L’Union européenne (représentée par le sigle UE) est une organisation politique et économique. Elle regroupe 27 pays européens.
Elle a pour objectif de favoriser la coopération entre ses membres.
Ainsi, les États collaborent notamment en matière de commerce, d’économie, d’environnement, de droits sociaux et de politique extérieure.
L’UE permet aussi aux citoyen.ne.s des pays membres de circuler, vivre et travailler librement dans toute l’Europe grâce à des accords comme l’espace Schengen et l’euro, utilisé par 20 de ces pays.
La Cour de Justice de l’Union européenne se représente sous le sigle CJUE. Il s’agit de l’institution judiciaire de l’UE.
Elle veille à ce que les lois européennes soient appliquées de manière uniforme dans tous les pays membres. Dès lors, elle peut être saisie par les gouvernements, les entreprises ou même les citoyen.ne.s si une question concerne le droit de l’Union.
Ses décisions sont contraignantes pour les États membres.
La jurisprudence
Dans cet article, nous allons évoquer à plusieurs reprises la « jurisprudence » de plusieurs cours de justice.
La jurisprudence se définit comme l’ensemble des décisions prises par les juges dans les tribunaux pour résoudre des affaires.
Ces décisions servent ensuite de guide ou de référence pour régler des cas similaires dans le futur.
Pour résumer, c’est comme une « règle » basée sur ce que les juges ont décidé dans le passé, pour aider à être juste et cohérent.e dans les jugements futurs.
Droits des femmes et Conseil de l’Europe : un parcours contrasté
Le Conseil de l’Europe et son tribunal, la CEDH, ont joué un rôle essentiel dans la protection des droits des femmes en Europe. En effet, leurs efforts ont permis d’importantes avancées.
Toutefois, il existe une certaine contradiction. Ainsi, des progrès significatifs ont été réalisés. Mais ils s’accompagnent aussi d’échecs.
Nous allons vous parler des grandes réussites du Conseil de l’Europe. Mais nous allons parler aussi des défis qui freinent encore la réalisation complète de l’égalité entre les genres/sexes et la protection des droits fondamentaux des femmes en Europe.
Le Conseil de l’Europe est un acteur clé dans la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes. Il s’agit aussi d’un acteur important dans la mise en place d’une protection juridique pour les droits des femmes en Europe.
Avec des outils comme la Convention d’Istanbul, il a établi des règles pour prévenir et lutter contre les violences faites aux femmes.
La Cour européenne des droits humains (CEDH), en tant qu’organe judiciaire du Conseil de l’Europe, a joué un rôle important en la matière. Elle a, ainsi, reconnu que les violences faites aux femmes constituent une violation des droits fondamentaux.
Dès lors, cela a élargi la portée de la Convention européenne des droits humains.
La Cour européenne des droits humains et l’égalité des genres/sexes : progrès et défis
Le pouvoir d’interprétation de la CEDH
La Convention européenne des droits humains ne traite pas explicitement des discriminations ou des violences fondées sur le genre/sexe.
Néanmoins, la jurisprudence de la Cour européenne des droits humains (CEDH) a progressivement évolué pour reconnaître l’importance de l’égalité des genres/sexes.
Ainsi, l’égalité des genres/sexes devient petit à petit un objectif légitime. Ce dernier justifie alors certaines restrictions aux droits et libertés inscrits dans la Convention.
La Cour a souligné la nature structurelle et systémique des discriminations basées sur le genre/sexe. Cela a notamment été mis en avant dans des affaires de violences domestiques. Dans ces dernières, les autorités étatiques n’avaient pas protégé les victimes ni offert de recours adéquats.
Quelques jugements qui ont fait avancer les droits des femmes
L’affaire Opuz contre Turquie
Par exemple, en 2009, dans l’affaire Opuz contre Turquie, la Cour a reconnu les violences basées sur le genre/sexe comme une forme de discrimination.
Ce jugement a marqué un tournant majeur dans son approche des violences faites aux femmes.
En effet, la Cour a estimé que les autorités turques avaient échoué à protéger la mère de la requérante, que son mari avait tuée.
Cette décision a établi l’obligation positive des États de protéger les femmes contre les violences basées sur le genre. Cependant, la Cour n’a pas fourni un cadre complet pour traiter les violences domestiques.
Les droits reproductifs des femmes
La CEDH s’est également prononcée en faveur des droits reproductifs des femmes.
Par exemple, elle considère que refuser aux femmes l’accès à la contraception constitue une violation de leur droit au respect de la vie privée et familiale.
Ainsi, dans l’affaire Pichon et Sajous contre France, la Cour a jugé que des pharmaciens ne pouvaient pas refuser de vendre des contraceptifs en raison de leurs croyances religieuses.
En effet, la Cour a considéré que cela portait atteinte aux droits des femmes.
De plus, la Cour a estimé que l’accès aux tests génétiques prénataux et aux informations sur l’état de santé du fœtus est protégé par la Convention.
Ainsi, dans l’affaire R.R. contre Pologne, la Cour a conclu que refuser à une femme ces informations transgressait son droit de ne pas subir de traitements inhumains et dégradants. Cependant, la CEDH n’a pas encore reconnu un droit à l’avortement.
Dans l’affaire V.C. contre Slovaquie, une femme rom a subi une stérilisation forcée pendant une césarienne. La Cour a jugé que la stérilisation forcée, sans le consentement éclairé de la patiente, constituait une violation des articles 3 et 8 de la Convention.
Cette affaire a mis en lumière la pratique répandue de la stérilisation forcée des femmes roms en Europe centrale et orientale.
Par la suite, cela a conduit à des changements dans les lois slovaques sur le consentement des patient.e.s.
Cependant, la Cour n’a pas abordé cette question sous l’angle de la non-discrimination en vertu de l’article 14.
Quelques exemples récents de pratiques nationales discriminatoires condamnées par la CEDH
Des affaires récentes ont mis en évidence les défis persistants dans la défense des droits des femmes.
Le congé parental
Par exemple, en 2021, dans l’affaire Gruba et autres contre Russie, la Cour a jugé les lois russes sur le congé parental discriminatoires.
En effet, la loi réservait ce droit aux femmes mais pas aux hommes. Cela constitue une discrimination fondée sur le sexe.
Les stéréotypes sexistes
De même, dans l’affaire X contre Pologne, la Cour a prononcé un arrêt luttant contre des stéréotypes dangereux.
En effet, la Pologne avant refusé la garde de son enfant à une mère en raison de sa relation avec une autre femme. Elle lui avait aussi refusé la garde du fait de l’absence d’un « modèle masculin » dans l’éducation de l’enfant.
La CEDH a jugé que refuser la garde à une mère pour ces raisons constituait une discrimination.
L’ordre automatiques des noms de famille en cas de désaccord des parents
Dans León Madrid contre Espagne, la Cour a examiné l’ordre automatique prévu pour les noms de famille à la naissance de l’enfant.
Cette affaire concerne les situations dans lesquelles les parents ne se mettaient pas d’accord sur l’ordre des noms. Dans ces conditions, la pratique espagnole consistait à mettre le nom de famille paternel en premier et le nom de famille maternel en seconde position.
La Cour a jugé que l’imposition automatique de cet ordre constituait une discrimination.
Le remariage
En 2023, dans l’affaire Nurcan Bayraktar contre Turquie, la Turquie avait imposé à une femme d’attendre au moins 300 jours pour pouvoir se remarier.
Certes, elle pouvait contourner cette période d’attente. Cependant, elle devait alors passer un examen médical pour prouver qu’elle n’était pas enceinte.
La Cour a estimé que le refus de la Turquie de permettre à cette femme de se marier sans examen médical constituait une discrimination.
De nombreuses critiques demeurent à l’égard de la CEDH
La CEDH a contribué de manière importante à l’avancement des droits des femmes en Europe.
Cependant, elle a aussi été critiquée pour son appréciation des droits des femmes et de stéréotypes préjudiciables.
En effet, des défis subsistent pour assurer une application cohérente dans tous les États membres. De plus, il reste un travail important pour surmonter les biais de genre. Car ces derniers restent profondément ancrés dans les systèmes juridiques nationaux.
Des biais centrés sur l’homme
Malgré les progrès, des théoriciennes féministes estiment que la Convention européenne des droits humains reflète encore des biais centrés sur les hommes.
En effet, la Convention a été écrite dans les années 1950 par des hommes. Puis, une magistrature majoritairement masculine l’a interprétée.
Ainsi, la Convention aurait tendance à négliger les violences spécifiques subies par les femmes.
Par exemple, la CEDH n’a pas encore reconnu la discrimination liée à la grossesse comme une forme de discrimination sexuelle.
En outre, des politiques apparemment neutres peuvent pourtant avoir des effets discriminatoires sur les femmes.
Par exemple, il existe des politiques de chômage fondées sur un modèle patriarcal. Dans ce dernier, l’homme est considéré comme la principale ou seule personne subvenant aux besoins du foyer. Cela peut entraîner des conséquences désastreuses pour les femmes qui ne sont pas considérée de la même manière par le système.
Le manque d’approche intersectionnelle
Malgré des avancées notables, la CEDH a été critiquée de ne pas adopter une approche intersectionnelle face aux discriminations.
Par exemple, dans l’affaire Yocheva et Ganeva contre Bulgarie, la Cour a reconnu l’importance de tenir compte des interactions entre le genre et d’autres facteurs dans les cas de discrimination. Malheureusement, la Cour n’a elle-même pas pleinement adopté cette approche.
Une évolution indispensable pour les droits des femmes
En conclusion, la CEDH a accompli des progrès significatifs dans la protection des droits des femmes.
Néanmoins, elle doit encore évoluer. Cela lui permettra d’intégrer une vision plus approfondie des questions de genre et des discriminations dans ses décisions.
D’une part, la Cour doit surmonter les biais masculins inscrits dans la Convention et ses interprétations. D’autre part, elle doit assurer une application cohérente entre les États membres et s’attaquer aux inégalités structurelles dans les systèmes juridiques nationaux.
L’approche des droits des femmes et de l’égalité des genres/sexes de l’Union européenne
Les droits des femmes et l’égalité des genres s’ancrent profondément dans les valeurs et les principes de l’Union européenne (UE).
Cependant, leur protection et leur promotion s’intègrent mieux dans le cadre juridique de certains États membres que d’autres.
Ainsi, l’UE a mis en place des politiques complètes pour garantir l’égalité des droits et des opportunités. Toutefois, leur application dépend fortement des contextes culturels et idéologiques propres à chaque pays.
L’UE fournit des lignes directrices et des principes généraux pour protéger les libertés fondamentales et respecter des normes morales.
Cela étant, elle accorde aux États membres une certaine souveraineté. Celle-ci leur permet d’interpréter et adapter ces politiques à leurs circonstances spécifiques.
Cette dynamique complexe entre législation commune et identités nationales distinctes peut à la fois unir et diviser l’UE. Ainsi, cela engendre souvent des variations subtiles dans la mise en œuvre des principes communs.
Le rôle clé de l’UE dans la défense des droits des femmes par le droit et son interprétation
L’Union européenne a établi un cadre juridique solide pour protéger les droits des femmes et promouvoir l’égalité des genres/sexes parmi ses États membres.
Ces principes s’inscrivent dans le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) et la Charte des droits fondamentaux de l’UE. En effet, ces textes offrent une base robuste pour garantir un traitement égal et des opportunités équitables, quel que soit le genre/sexe.
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) joue un rôle essentiel dans l’interprétation et l’application de ces lois à travers sa jurisprudence.
Avec ses décisions majeures, la CJUE a constamment défendu les droits des femmes. Ainsi, cela a contribué à renforcer l’engagement de l’UE envers l’égalité des genres/sexes comme valeur fondamentale.
Cependant, des défis subsistent. Et une action résolue des institutions européennes reste cruciale pour faire face aux nouvelles menaces.
De plus, cette action est aussi fondamentale pour garantir une protection efficace des droits des femmes dans toute l’Union européenne.
Le rôle de la CJUE dans la promotion de l’égalité des genres
En outre, la CJUE joue un rôle central dans l’avancement de l’égalité des genres/sexes dans l’UE.
Au départ, ses décisions visaient surtout à garantir l’égalité formelle. Cependant, elles s’orientent aujourd’hui davantage vers une égalité réelle.
La Cour a rendu des jugements marquants. Ces derniers ont porté sur l’égalité salariale, la discrimination au travail et l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée.
Au travers de ces jugements, la Cour a affirmé les droits des femmes. Ainsi, elle a poussé les États membres à intégrer les principes d’égalité dans leurs lois et politiques nationales.
Cependant, l’influence de la CJUE reste limitée par sa nature réactive. Elle ne peut se prononcer que sur les affaires qui lui sont soumises.
Malgré cela, ses interprétations progressistes des traités et directives de l’UE demeurent essentielles. En effet, elles ont permis de promouvoir l’autonomisation des femmes et d’éliminer certains obstacles systémiques à l’égalité des genres/sexes dans l’Union.
L’Union européenne face au recul de l’égalité des genres/sexes
Comme le Conseil de l’Europe, l’Union européenne a accompli des avancées significatives dans la promotion de l’égalité économique, politique et sociale des femmes.
Pourtant, ces dernières années ont vu une inquiétante tendance de rejet de ces progrès. En effet, des mouvements populistes de droite à travers le continent s’opposent de plus en plus aux politiques visant à renforcer les droits et la protection des femmes.
Certains États membres ont même tenté de retirer les termes « genre » et « égalité des genres » des principaux documents politiques de l’UE. Cette tendance compromet les efforts en faveur de l’égalité.
De plus, cela soulève également des questions sur l’engagement de l’UE à défendre les droits humains fondamentaux et les valeurs démocratiques.
En tant qu’interprète et gardienne des lois européennes, la CJUE devra jouer un rôle décisif pour lutter contre cette vague réactionnaire.
De surcroît, elle aura la lourde tâche d’affirmer la position de l’UE comme défenseuse de l’égalité et de la justice pour toutes et tous.
Les progrès inégaux de l’UE dans la protection des droits des femmes
L’Union européenne s’efforce de promouvoir et de protéger les droits des femmes à travers divers instruments juridiques et initiatives politiques.
La Directive sur les droits des victimes (2012/29/UE) et la Convention d’Istanbul constituent des exemples notables des efforts déployés pour lutter contre les violences fondées sur le genre/sexe dans les États membres.
L’adoption récente de la première directive européenne spécifiquement consacrée à la lutte contre les violences faites aux femmes marque une étape importante. Il s’agit de la Directive sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (2024/1385/UE) du 14 mai 2024.
Cette directive vise à prévenir les violences, protéger les victimes et poursuivre les auteurs. Elle inclut des mesures comme la criminalisation des violences en ligne, des mariages forcés et des mutilations génitales féminines.
Malgré ces avancées, on a critiqué la directive pour ses lacunes. Parmi elles, l’absence d’une définition complète du viol et l’omission de certaines violences. Notamment, parmi les violences non-reprises dans le texte, on peut citer les mutilations génitales des personnes intersexes ou la stérilisation forcée.
De plus, elle ne répond pas suffisamment aux besoins spécifiques des femmes migrantes. En outre, elle ne prévoit pas assez de ressources pour son application.
Malgré ses limites, cette directive est perçue comme un pas crucial vers une approche plus inclusive pour combattre les violences de genre/sexe.
Ainsi, les organisations de la société civile plaident pour son application effective et des révisions futures pour combler ses lacunes.
Conclusion sur les normes de l’Union européenne
Toutefois, l’application et le respect de ce type de mesures varient d’un pays à l’autre. Certains États ne parviennent pas à garantir les droits et la sécurité des femmes.
Ainsi, malgré les ambitions de l’UE, un écart persiste entre les principes juridiques établis à l’échelle supranationale et les réalités vécues par les femmes. C’est particulièrement le cas dans les pays où des normes patriarcales et des reculs démocratiques sont profondément ancrés.
L’Union européenne a accompli des progrès significatifs. Cependant, des efforts continus restent nécessaires. Ils permettront de faire avancer l’égalité des genres et protéger les droits des femmes.
À travers son cadre juridique et les décisions de la CJUE, l’UE a posé les bases de l’égalité des genres/sexes. Dès lors, les États membres doivent les respecter. Cependant, des défis subsistent. Et davantage de travail demeure requis pour garantir la protection complète des droits des femmes et promouvoir l’égalité des genres.
L’impact de la Convention d’Istanbul sur l’égalité des genres/sexes dans l’Union européenne
UE et Convention d’Istanbul
En 2017, l’UE a signé la Convention d’Istanbul.
Après six années de délibérations, l’UE a officiellement adhéré à la convention en juin 2023.
Cette adhésion représente un engagement symbolique important. Elle vise à renforcer la protection juridique des victimes de violences.
Tous les États membres ont signé la convention. Mais certains rencontrent encore des difficultés pour la ratification.
La différence entre la signature et la ratification d’un traité
En effet, la signature et la ratification d’un traité constituent deux étapes différentes. On vous explique la différence !
La signature représente la première étape. Elle montre que l’État est d’accord avec le contenu du traité et qu’il a l’intention de le respecter à l’avenir. Toutefois, la signature seule n’oblige pas encore l’État à appliquer les règles du traité.
C’est seulement au moment de la ratification que l’État s’engage véritablement. En effet, la ratification implique que l’État a obtenu l’approbation nécessaire. Il s’agit souvent de l’approbation du Parlement ou d’une autre autorité nationale.
Une fois ratifié, le traité devient juridiquement contraignant pour l’État. Cela signifie que l’État doit respecter les règles du traité.
En résumé, la signature montre une intention, tandis que la ratification engage légalement l’État à respecter le traité.
Parmi les États européens qui rechignent à ratifier la Convention d’Istanbul, il y a notamment la Bulgarie, la République tchèque, la Lettonie, la Lituanie, la Hongrie et la Slovaquie.
L’influence de la Convention d’Istanbul sur l’UE
La Convention d’Istanbul du Conseil de l’Europe vise à prévenir et à combattre les violences faites aux femmes et les violences domestiques.
Cette convention a constitué une étape majeure dans l’avancement de l’égalité des genres/sexes en Europe.
Depuis sa signature par l’UE en 2017, la Convention a servi de cadre juridiquement contraignant pour harmoniser les efforts des États membres dans la lutte contre les violences sexistes.
Cependant, sa mise en œuvre a rencontré une opposition des mouvements anti-genre. Cela a constitué une menace directe pour les progrès réalisés en matière de droits des femmes.
Le Parlement européen a joué un rôle crucial en la matière. Ainsi, il a débattu et orienté le discours autour de la Convention.
Les différentes positions défendues au Parlement européen mettent en avant à la fois le soutien et les résistances à cette initiative.
L’UE poursuit ses efforts pour mettre en place des législations contre la violence basée sur le genre/sexe. Quoi qu’il en soit, l’analyse de la Convention sous un angle intersectionnel et un angle juridique féministe restera essentielle. En effet, cette approche permettra de s’assurer que la législation future aborde efficacement les inégalités structurelles à l’origine des violences.
La ratification de la Convention d’Istanbul par l’UE : une étape clé pour harmoniser les cadres juridiques des États membres
Le Parlement européen (PE) a représenté un moteur clé de la ratification de la Convention d’Istanbul par l’UE.
L’enjeu était de mieux prévenir et combattre les violences faites aux femmes et la violence domestique. Dès lors, le PE a organisé plusieurs débats et résolutions soutenant l’adhésion de l’UE à cet instrument international de référence.
La ratification de la Convention par l’UE est considérée comme une étape cruciale. En effet, cette dernière permet d’harmoniser les cadres juridiques et les orientations politiques des États membres. Ainsi, elle contribue au développement d’une approche européenne cohérente pour répondre à cet enjeu fondamental.
L’adhésion à la Convention d’Istanbul suppose un alignement des mesures des États membres sur les normes énoncées dans la Convention. Ainsi, l’UE peut aider à surmonter les disparités et garantir une protection plus complète des droits des femmes à travers l’Europe.
L’opposition à la Convention d’Istanbul au Parlement européen
Une opposition des mouvements anti-genre
La ratification de la Convention d’Istanbul par l’Union européenne a suscité une forte opposition de la part des mouvements anti-genre.
Cette opposition a été particulièrement visible au Parlement européen. Ainsi, les forces politiques opposées à l’adhésion ont influencé le discours autour de la Convention.
De plus, ces mouvements ont mis en avant les supposées menaces qu’elle serait susceptible de poser pour les normes de genre traditionnelles. Ils ont aussi exprimé des inquiétudes sur la promotion de « l’idéologie du genre » par la Convention et ses implications potentielles pour les structures familiales traditionnelles.
Cette opposition soutenue a compliqué les efforts de l’UE pour incorporer pleinement le cadre de la Convention dans ses lois.
Au sein de certains Etats membres
Cette opposition a été particulièrement manifeste dans des pays comme la Bulgarie.
De même, la Croatie a perçu la nomination de représentant.e.s d’organisations anti-genre au sein du groupe de travail sur la ratification comme une contradiction avec l’objectif même du groupe de travail.
La mise en œuvre de la Convention d’Istanbul a également rencontré des défis dans des pays comme la Hongrie. Ainsi, ce pays a exclu les organisations de défense des droits des femmes de la conception de nouveaux services et des financements pour lutter contre la violence domestique.
À la place, des acteurs qui ne suivent pas nécessairement une approche sensible au genre ont repris ces financements et ces services. Cette exclusion des organisations féministes a soulevé des inquiétudes. En effet, elle pourrait nuire à l’approche globale et intersectionnelle que la Convention cherche à promouvoir.
Un contexte politique plus large
L’opposition à la Convention d’Istanbul s’inscrit également dans un contexte politique plus large. Effectivement, les mouvements anti-genre ont cherché à saboter sa mise en œuvre par diverses stratégies. Ainsi, ces mouvements ont entrepris de diminuer le rôle des organisations de la société civile.
Par ailleurs, ils ont également restreint la liberté d’expression. Et ils ont nommé des représentant.e.s d’organisations anti-genre à des postes politiques clés.
Pour comprendre pleinement l’effet de la Convention, il est nécessaire d’examiner le contenu des politiques et des lois. De plus, il est aussi essentiel de s’intéresser à l’inclusivité des processus politiques et au contexte politique plus global dans lequel elles sont mises en œuvre.
La perspective iusféministe sur la Convention d’Istanbul
La Convention d’Istanbul adopte une approche hybride.
En effet, elle mêle des principes féministes et une perspective partiellement intersectionnelle. Cela a fait l’objet d’analyses approfondies depuis une grille de lecture iusféministe.
L’approche iusféministe se définit comme une perspective d’analyse juridique qui vise à intégrer les principes féministes dans le droit.
Les forces de la Convention d’Istanbul
La Convention d’Istanbul constitue un texte important. En effet, il s’agit du premier instrument juridique européen contraignant spécifiquement consacré à la lutte contre la violence de genre.
Le texte adopte une perspective clairement féministe dans son approche de la violence. Effectivement, il définit la violence comme une forme de discrimination et une manifestation des inégalités structurelles entre les femmes et les hommes.
De plus, la Convention contribue à l’harmonisation des cadres juridiques des États membres qui l’ont ratifié.
De ce fait, cela favorise une approche plus cohérente et efficace de la lutte contre la violence de genre/sexe à l’échelle européenne.
En outre, la Convention prend en compte les besoins spécifiques des femmes migrantes et des demandeuses d’asile.
Ces éléments sont considérés comme des aspects positifs. En effet, ils contribuent à un cadre juridique plus complet pour aborder les violences fondées sur le genre.
Les faiblesses de la Convention d’Istanbul
Un langage neutre
Cependant, le texte adopte parfois un langage et des formulations neutres du point de vue du genre. Or, cela peut masquer la nature genrée de certaines formes de violence.
Le texte manque de spécificité. En effet, certaines dispositions ne reconnaissent pas explicitement que la violence de genre affecte de manière disproportionnée les femmes et les filles, en raison des inégalités structurelles existantes.
La Convention d’Istanbul possède un aspect « aveugle au genre ».
Ainsi, la Convention ne reconnaît pas exactement que les violences proviennent des inégalités structurelles existantes. Ces fragilités dans le texte peuvent limiter son efficacité pour combattre les inégalités.
Le lien avec la culture
Par ailleurs, certains aspects de la Convention risquent de « surculturaliser » certaines formes de violence de genre.
Ainsi, la convention parle spécifiquement de pratiques comme la mutilation génitale féminine et les crimes d’honneur. Et elle les associe souvent à certaines cultures.
Cela peut renforcer des stéréotypes. En effet, cela donne l’impression que ces violences sont liées à des communautés spécifiques. Or, en mettant l’accent sur ces pratiques « traditionnelles », le texte peut faire penser que la violence de genre/sexe est plus courante ou plus grave dans certaines cultures.
Cela masque le fait que les violences de genre/sexe constituent un problème mondial et structurel. Cette approche pourrait aussi stigmatiser certaines communautés. En outre, elle pourrait réduire l’importance de la violence de genre/sexe dans les sociétés occidentales.
L’approche intersectionnelle qui fragilise, paradoxalement
De plus, le texte s’efforce d’adopter une approche intersectionnelle. Cependant, il risque d’augmenter la vulnérabilité des femmes migrantes et demandeuses d’asile.
En effet, cette vulnérabilité accrue découle principalement de la manière dont le texte aborde leurs besoins spécifiques.
Ainsi, il met un accent particulier sur ces groupes. Dès lors, le texte peut les présenter comme vulnérables du simple fait de leur statut de migrante ou de réfugiée.
Cette approche risque de renforcer des stéréotypes et de négliger la capacité d’action de ces femmes.
De plus, cela risque d’occulter les causes profondes de leur vulnérabilité. En effet, elle vient en réalité des politiques migratoires et d’asile restrictives, ainsi que des discriminations systémiques dans les pays d’accueil.
Des leçons de la Convention d’Istanbul précieuses pour le futur
La Convention d’Istanbul constitue un instrument clé dans les efforts de l’Union européenne pour lutter contre la violence fondée sur le genre/sexe et promouvoir l’égalité des genres/sexes.
Certes, l’UE développe des politiques sur cette question. Cependant, les leçons tirées de la mise en œuvre de la Convention et l’analyse iusféministe resteront précieuses.
Une approche intersectionnelle et inclusive sera essentielle pour le succès des futures initiatives de l’UE dans ce domaine.
En outre, l’UE devra s’appuyer sur les forces de la Convention tout en abordant ses limites.
Ainsi, l’UE pourra élaborer un cadre juridique complet qui protège efficacement les droits des femmes à travers l’Europe.
Eliane Le Bihan
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