Masculinisme

Définition
Le masculinisme est un mouvement social conservateur. Celui-ci prétend que les hommes et la masculinité sont en crise. Cette crise serait due aux femmes et au féminisme. En effet, ces dernières domineraient la société et les institutions. Dès lors, le patriarcat serait une invention.
Les masculinistes cherchent donc à lutter contre cette crise, et contre le pouvoir des femmes de façon générale. Il existe plusieurs groupes qui constituent le mouvement. Et chacun a des revendications différentes.
Les différents groupes font souvent une apologie de la violence sexiste. Ils appellent à un retour en arrière, avant les avancées des droits sociaux.
Le masculinisme est-il le versant masculin du féminisme ?
Une croyance répandue
Cette croyance revient souvent. Et, pourtant, non. Le masculinisme et le féminisme n’ont pas grand-chose à voir l’un avec l’autre.
En effet, le féminisme prône un idéal de paix et d’égalité, ainsi que la lutte contre des oppressions qui durent depuis des siècles. Le masculinisme, au contraire, répand la haine.
Une soi-disant réponse aux féminismes
Pour nourrir cette croyance, certains masculinistes racontent que le masculinisme s’est développé en réponse aux féminismes. Selon eux, les avancées faites en termes de droits des femmes et de lutte contre les violences faites aux femmes auraient effrayé certains hommes. Ces derniers auraient alors voulu se défendre contre la « crise de la masculinité ». Nous y reviendrons.
Dans cette continuité, les masculinistes cherchent souvent à faire taire les femmes et leurs revendications. Pourtant, les mouvements féministes ne remettent pas en cause les luttes des autres mouvements sociaux. Au contraire, c’est l’égalité et la solidarité qui priment.
Existe-t-il des liens entre les deux malgré tout ?
Dire que le masculinisme est une réponse aux féminismes est conforme aux discours haineux.
Néanmoins, il existe quelques liens entre les deux.
Par exemple, beaucoup d’hommes ne se sentent pas représentés par les féminismes. Ils estiment essayer aussi de remettre en question les rôles genrés. Mais ils ne se sentent pas inclus dans les mouvements féministes. A cause de ce sentiment de rejet, ils adhèrent plus facilement au masculinisme.
La crise de la masculinité
Une théorie masculiniste
La plupart des théories masculinistes partent du constat que la masculinité est en crise. Selon ces théories, il y aurait plusieurs manifestations de cette crise selon les groupes. Les raisons, en revanche, restent toujours la même : les femmes et les avancées sociales.
Toujours selon ces théories, les hommes sentiraient qu’ils sont en danger, que leurs droits diminuent, que leur domination ralentit. Et cela les dérangerait.
Donc, certains d’entre eux se mobiliseraient pour lutter contre la crise de la masculinité et faire revenir la domination masculine. Cela passe par exemple par le fait de pouvoir être sexiste en toute impunité.
Mais, surtout, une théorie critiquée
Le chercheur québécois François Dupuis-Déri a écrit de nombreux livres sur le masculinisme dont un sur le « mythe de la crise de la masculinité ».
Il y explique que la crise constitue un fantasme conservateur.
En réalité, à écouter les masculinistes, on constate qu’il y a une crise de la masculinité toutes les décennies depuis plusieurs siècles.
Le fait de se sentir en danger parce que des groupes sociaux discriminés gagnent des droits n’a rien de nouveau. Actuellement, ces groupes sociaux sont par exemple les femmes et les personnes LGBTQ+.
Le mythe de la matrice et la pilule rouge
Il existe une théorie très courante au sein des groupes masculinistes. Elle reprend l’idée des films Matrix, réalisé par les sœurs Wachowski.
Que raconte le film Matrix ?
Dans le film, Néo, le personnage principal, se rend compte qu’il vit dans une simulation. Celle-ci se nomme « la matrice ». En réalité, les humain.e.s sont placé.e.s dans un coma artificiel. On les contrôle par des machines. Et celles-ci les plongent dans un univers qui ressemble à une vraie vie. D’ailleurs, la matrice fait croire aux humain.e.s que le monde dans lequel ils/elles « vivent » est réel.
A un moment crucial du film, Néo se trouve face à un dilemme. Il a le choix entre deux pilules : une bleue et une rouge.
Avec la bleue, il restera dans l’illusion et replongera dans son coma artificiel. Avec la rouge, au contraire, il restera « éveillé » et pourra lutter contre la matrice.
Comment les masculinistes reprennent-ils ce film à leur compte ?
Les masculinistes reprennent donc cette idée. Mais, ils l’adaptent à leur théorie.
La matrice, selon eux, est le fait de dire que nous vivons dans un patriarcat. En effet, ils pensent que la société actuelle a été forgée par les femmes pour les femmes. Elles sont donc au pouvoir et inventent la domination masculine. Les hommes sont ainsi les véritables victimes d’oppression.
Les femmes inventeraient aussi les violences qu’elles subissent. Elles le feraient exprès pour pouvoir coller des étiquettes d’agresseurs et de violeurs sur les hommes quand elles en ont envie.
C’est ainsi que l’expression prendre la « pilule rouge » est devenue courante dans ces milieux. Elle montre une prise de conscience généralisée de cet état d’oppression des hommes par les femmes. Le réaliser et lutter contre revient alors à prendre la pilule rouge, comme Néo dans les films (désolée pour le spoil).
Les masculinistes constituent, dans ce scénario, les hommes les plus courageux. En effet, la majorité d’entre eux choisissent la pilule bleue. Les masculinistes les perçoivent alors comme trop peureux pour affronter leurs oppresseuses.
Les femmes aussi peuvent-elles prendre la pilule rouge ?
Et bien non. Car, au passage, les femmes ne peuvent prendre aucune des deux pilules.
En effet, elles n’ont aucun intérêt à le faire. Et puis, elles n’ont de toute façon pas la volonté de reconnaître leurs mensonges quant à l’oppression soi-disant subie.
Cependant, nous observons que certaines femmes adhèrent quand même à cette théorie. Certaines en développent même un business sur les réseaux…
Comment le masculiniste se répand-il ?
Auprès des jeunes
Le masculinisme résonne particulièrement auprès des jeunes hommes.
En effet, ces derniers sont encore en pleine construction. Et, ils se posent des questions.
Or les premières réponses qu’ils obtiennent viennent des masculinistes, bien souvent.
Par conséquent, ils vont prendre leurs paroles pour la vérité. Et y adhérer plus facilement.
Une réponse à un mal-être
On l’observe. Les discours masculinistes répondent à un mal-être profond.
On dit aux hommes qu’ils sont les privilégiés de la société. Mais ils ne le sentent pas tous. C’est d’ailleurs le propre des privilèges. Ils nous semblent tellement normaux qu’on ne se rend pas compte que d’autres n’en bénéficient pas.
Par exemple, les hommes peuvent se sentir mal mentalement, ou en difficulté financière. Mais, il existe peu d’espace où ils osent exprimer ce mal-être. C’est la conséquence du patriarcat mais ils ne le perçoivent, évidemment, pas.
Dès lors, les discours masculinistes expriment quelque chose qui fait écho à leur souffrance. Même (et surtout) si ce n’est pas acceptable socialement. Et cela leur offre un endroit d’expression et d’échange auquel ils n’avaient jamais accédé ailleurs.
L’importance des réseaux sociaux
Les masculinistes recrutent énormément sur les réseaux sociaux.
En effet, ils ont des canaux de discussion, des espaces d’échanges, des pages avec des vidéos choc, des podcasts.
Il existe plusieurs groupes masculinistes qui ont chacun des manières de se répandre différentes. Une majorité d’influenceurs/influenceuses masculinistes utilisent beaucoup les formations en ligne. Ils font ainsi payer des « cours » pour expliquer leurs théories, pour devenir des « hommes alphas » ou encore pour adopter leur mode de vie.
Il y a une certaine apologie de la violence sur ces réseaux. Elle peut choquer au premier abord, certes. Mais elle se banalise rapidement.
Evidemment, cette haine existe depuis bien avant internet. Mais cela a permis aux idées de prendre forme et de se répandre bien plus rapidement.
En effet, il est plus facile de rejoindre une communauté et d’être en contact avec d’autres qui ont des idées similaires. De plus, le fait d’avoir un vocabulaire particulier, souvent avec des mots inventés, renforce la sensation de communauté.
Non pas des individus en marge mais plutôt des communautés organisées
Les médias aiment à nous présenter les masculinistes comme des individus en marge de la société. On imagine rapidement trois types ringards planqués dans leur garage, sans vie sociale, sans emploi et qui n’ont pas vu de douche depuis 2 mois.
Et pourtant, cette représentation est fort éloignée de la réalité. Sans oublier qu’elle entraîne une conséquence importante. A cause d’elle, on a tendance à sous-estimer l’ampleur et le danger de ces militants.
Car, la réalité montre, au contraire, qu’ils sont plusieurs dizaines de milliers. Ils ont une communauté organisée. Sur Reddit, certaines pages incels ont plus de 40 000 abonné.e.s par exemple. Et cela ne représente qu’un seul groupe. On peut donc imaginer sans peine que le chiffre réel de tous les masculinistes doit être beaucoup plus élevé.
Cela devrait nous alerter sur le danger de ce mouvement. Nous y reviendrons.
Les différents groupes masculinistes
Voici une présentation rapide de quelques groupes masculinistes. Cette présentation ne se veut pas exhaustive. Mais, elle permet de comprendre le maillage entre les différents mouvements masculinistes. Car, il existe des liens entre eux. En effet, ils ne sont pas totalement séparés.
Les incels
Que signifie le mot « incel » ?
Le mot incels vient de la contraction des mots anglais « involuntary celibates » ou en français « célibataires involontaires ».
Ce groupe masculiniste est constitué d’hommes célibataires « malgré eux ». Ils estiment que les femmes font exprès de leur refuser des relations sexuelles.
En effet, ils ne veulent pas être célibataires ou inactifs sexuellement. Malheureusement, ils le sont involontairement. A cause des femmes.
Il y a dans ce groupe une obsession pour le sexe (hétérosexuel, bien sûr) et le fait d’en être privé.
La théorie du « 80-20 »
Leur communauté se regroupe autour de la théorie du « 80-20 ». Selon cette théorie, 20% des hommes profitent de 80% des relations sexuelles. Ces hommes-là attirent toutes les femmes sans en laisser pour les autres.
La contrepartie, c’est évidemment que 80 % des hommes doivent se partager les 20 % de femmes restantes. Celles, sans doute, les moins intéressantes. Avec moins de valeur…
La notion de « valeur sur le marché sexuel »
Ils utilisent donc la notion de « valeur sur le marché sexuel ».
Ainsi, chaque personne aurait une valeur qui la rendrait attirante ou non aux yeux des autres. Tout en haut de la pyramide, il y a les « Chad » ou les mâles alphas. Et tout en bas, il y a les incels.
Selon eux, les seules femmes qui acceptent d’aller avec eux sont souvent moches, bêtes, déjà « utilisées ». En effet, ils n’ont le droit qu’aux « restes » des autres hommes.
De plus, au sein du groupe, il y a des sous-catégories selon différents critères qui les rendent plus ou moins attractifs : leur calvitie, leurs cheveux roux, leur couleur de peau…
L’extrémisme de l’idéologie incel
On ne peut pas leur reprocher un manque d’imagination. En effet, les incels trouvent plusieurs solutions à leur situation :
- Monter de catégorie pour devenir un mâle alpha et attirer les femmes : musculation, style vestimentaire, etc. ;
- Suicide ;
- Appel au viol et à la violence sexuelle pour « apaiser » les envies sexuelles ;
- Appel aux féminicides.
Leurs idées sont tellement extrémistes qu’ils sont obligés d’inventer des mots pour décrire ce dont ils parlent.
Par exemple, il ont inventé les « rapecels », soit le mélange entre incel et rape (viol en anglais). Cela décrit les incels qui violent des femmes pour leur plaisir sexuel.
Les liens avec d’autres mouvements de haine
Le racisme se trouve malheureusement très présent dans leur idéologie. Ainsi, ils pensent que les hommes non-blancs sont inférieurs.
Cependant, ces hommes racisés attireraient plus les femmes, ce qui est inadmissible pour eux.
Ainsi, ils entretiennent des liens très forts avec les sphères racistes et les suprémacistes blancs.
D’ailleurs, les forums incels et masculinistes, en général, partagent des théories comme celle du « grand remplacement ». Selon cette théorie, la population blanche serait en train de se faire « remplacer » par des personnes non-blanches, souvent musulmanes.
Il existe d’ailleurs un projet d’état ethnique au sein du mouvement incel. Le but ? Ne permettre qu’aux femmes blanches d’avoir des enfants pour lutter contre ce grand remplacement.
Les pick-up artists
Qui sont les pick-up artists ?
Un autre groupe masculiniste important se nomme les « pick-up artists ». Ce groupe est proche des incels.
Ils croient en une séparation très stéréotypée entre les femmes et les hommes. Ainsi, ils voient le sexe hétérosexuel comme le summum de la masculinité et des exploits masculins. Et les femmes comme des objets sexuels.
L’apprentissage de la séduction
Contrairement aux incels, ils pensent qu’il est possible d’apprendre les codes de la séduction. Et c’est même le moyen de pouvoir avoir des relations sexuelles et des relations avec des femmes de façon générale.
Les pick-up artists, ou « artistes de la drague » ont un fonctionnement presque sectaire. On y retrouve des gourous « experts » qui apprennent aux autres.
Cela passe par le développement personnel, l’amélioration de son apparence physique, l’augmentation de la confiance en soi, l’augmentation de la richesse, l’apprentissage des codes sociaux pour interagir avec les femmes, les codes des agressions sexuelles (qui leur permet d’agresser sans risque pour eux), des techniques pour ne pas être nerveux en parlant à des femmes, etc. La liste pourrait continuer encore.
Par exemple, certains conseillent de se mordre la langue pour ne pas parler trop vite. Ou pour ne pas bégayer. Ou encore, de couper la parole tous les 10 mots pour montrer que l’homme domine la conversation.
Leur vision de la séduction
Les femmes auraient des stratégies de défense contre les hommes. Par conséquent, il leur faut savoir comment aller au-delà de ce « bouclier », à la même manière qu’un dresseur arrive à dresser les animaux malgré leur caractère.
Pour cela, il y a un impératif du mâle alpha. Il faudrait adopter un comportement « d’homme des cavernes ».
On le voit, leur vision de la séduction se rapproche de la chasse. Ils voient les femmes comme des proies à attraper. Il y a ainsi une infantilisation et déshumanisation des femmes en tant que classe de genre.
Une industrie qui rapporte
En 2021, selon les estimations, leur groupe valait environ 100 000$. Ce montant découle notamment de la vente de livres, de formations et d’autres outils.
C’est donc devenu une véritable industrie qui utilise les peurs et les insécurités des hommes pour se faire de l’argent.
Les MGTOW (Men Going Their Own Way)
Qui sont les MGTOW ?
Un autre groupe s’identifie comme des MGTOW. Ce sigle vient de l’anglais : men going their own way. On peut traduire ça par : « Hommes qui tracent leur propre route ».
Les hommes de ce groupe choisissent de s’éloigner le plus possible des femmes car elles seraient nocives. Ils choisissent donc le célibat. Même si certains continuent d’avoir une vie sexuelle.
A cela s’ajoute un rejet des gouvernements dits gynocratiques. C’est-à-dire que, selon eux, les Etats seraient dominés par les femmes. Et les décisions politiques discrimineraient les hommes. Pour lutter contre cela, ils choisissent l’isolationnisme pour pouvoir être la seule personne à contrôler ses biens, ses décisions.
L’isolement des hommes
Il y a 4 niveaux d’isolement possible, selon eux. Ces niveaux débutent après le niveau 0 qui consiste à « prendre la pilule rouge » :
- Renoncement aux relations amoureuses longues ;
- Renoncement aux relations, même courtes ;
- Désengagement économique ;
- Rejet de la société « pilule bleue ».
La majorité reste vers le niveau 2. Ils restent donc dans la société en renonçant seulement aux relations, mais sans pour autant vivre en ermite dans la forêt.
Leur vision des femmes
Selon eux, la seule relation signifiante avec une femme serait d’ordre sexuel.
En outre, leur plus grande peur est d’être accusé d’agressions sexuelles. La seconde est qu’une femme tombe enceinte contre leur volonté.
Donc, en évitant tout contact avec les femmes, il y a moins de risque d’être faussement accusé d’agressions sexuelles et de finir en prison. Ou de devenir père par accident.
De plus, toujours selon eux, les femmes ne contribuent pas à ajouter de la valeur à la société. Elles sont des parasites. Sans elles, ils peuvent atteindre des hauts niveaux de création, de découvertes scientifiques…
En effet, ils estiment que le génie mâle serait contaminé par la médiocrité féminine. Et que les femmes volent souvent les créations des hommes pour se les approprier.
Les activistes pour les droits des hommes
Un autre groupe de masculinistes se concentre sur les droits des hommes.
Ils considèrent que les féminismes ont créé des discriminations contre les hommes. Selon eux, les droits des femmes auraient dépassé ceux des hommes.
Ils ont donc choisi de se réunir en mouvement pour les droits des hommes. Cela constituerait un moyen efficace de se défendre contre les féminismes.
Pour eux, il y a une manipulation de la part des femmes autour des violences sexuelles et de la violence conjugale, notamment. Les femmes inventeraient ces agressions pour gagner des droits aux dépends des hommes.
Et, toujours selon eux, cette discrimination se voit dans plusieurs domaines.
Les droits des pères
Ils estiment que la famille est un endroit où les pères ont perdu beaucoup de droits.
Les activistes pour les droits des hommes dénoncent la « mauvaise répartition » des gardes d’enfant, par exemple. Selon eux, les femmes empêchent les hommes de voir leurs enfants sans aucune raison. D’ailleurs, la justice prend parti pour les femmes qui bénéficient de plus de confiance de sa part. Pour cette raison, ils promeuvent la théorie du syndrome d’aliénation parentale. Cela leur permet de décrédibiliser les femmes au profit des pères.
Pourtant, nous avons une réponse assez simple à cet argument : dans la majorité des cas où la garde exclusive est attribuée à la mère, le père n’avait pas fait de demande de garde ! Dès lors, si les pères n’obtiennent pas la garde de leurs enfants, c’est parce qu’ils ne la souhaitent pas.
Ensuite, plus de 85% des violences sexuelles faites aux enfants sont commises par des hommes. Donner la garde aux mères permet de protéger les enfants victimes.
La sur-mortalité des hommes
Ensuite, les activistes pour les droits des hommes dénoncent des situations où les hommes meurent plus souvent que les femmes. C’est par exemple le cas dans l’armée, ou sur les chantiers.
Selon leur théorie, c’est à cause des rôles genrés que ces morts arrivent. Les hommes se sentent obligés de choisir un métier dangereux. Et sont donc plus à risque de mourir.
Sur ce sujet, ils rejoignent les féministes dans le fondement de leur pensée. Mais, ils en tirent des conclusions opposées. Si le féminisme prône la fin du patriarcat pour abolir les rôles genrés, le masculinisme critique les femmes comme étant à la base de cette construction.
Ils mettent en avant les statistiques liées aux suicides. Ils montrent ainsi le fait que la plupart des personnes qui se suicident sont des hommes. Cependant, ils ne précisent pas que la majorité des tentatives de suicide sont faites par des femmes. Ils occultent aussi le fait que les hommes ont recours à des méthodes beaucoup plus violentes (et efficaces) lors de leur passage à l’acte. Cela explique donc ce chiffre plus important d’hommes morts par suicide.
Les risques que ces mouvements comportent
Un des objectifs principaux du masculinisme est d’arrêter la crise de la masculinité.
Pour cela, les masculinistes mettent en avant les actions et les comportements « virils ». C’est par exemple le fait de dominer des femmes ou de faire des actions sportives impressionnantes comme escalader des immeubles.
Le mouvement masculiniste comporte donc des risques. A la fois pour ses adeptes et pour les personnes autour.
Les appels à la violence physique
Pour montrer sa virilité, une solution poussée par les masculinistes est la violence. Il faut être musclé et utiliser ses muscles. La domination des autres, autant des femmes que des autres hommes est très importante.
Ainsi, si un homme se fait insulter ou provoquer, il doit se battre pour défendre son honneur d’homme viril. Il doit se comporter en « mâle alpha ».
Il existe donc une forte apologie de la violence physique dans les milieux masculinistes. Se battre ou frapper quelqu’un est vu comme un acte glorieux. Cela montre que l’homme est un « vrai homme ».
Malheureusement, ils recommandent aussi (et surtout) cette violence dans le cadre intrafamilial. En suivant leur vision, la domination masculine ne doit pas être remise en question et surtout pas par sa propre famille. La famille constitue un endroit où l’autorité d’un homme doit rester la plus forte.
Ainsi, la violence paraît légitime si le compagnon / la compagne ou les enfants n’obéissent pas.
De plus, le masculinisme va souvent de paire avec le racisme. Les femmes non-blanches sont donc plus vulnérables que les autres à cette violence.
Les violences sexuelles
Pour certaines communautés masculinistes, les femmes ne sont que des « salopes ». Leur corps n’existe que pour les relations sexuelles. Il serait donc légitime de « l’utiliser ».
Or, le système juridique actuel, que ce soit en Belgique ou partout dans le monde, est encore patriarcal. Les masculinistes utilisent alors l’impunité des agresseurs face à la justice pour se protéger.
En effet, sur les forums d’échange, certains disent qu’en violant il y a 98.5% de chances de ne pas se faire condamner. Ils poussent donc les autres hommes à agresser.
Il existe un véritable fantasme de l’agression sexuelle. Cela montrerait la « puissance » masculine. Ce serait comme une forme ultime de domination, à travers les actes sexuels. Ainsi, une majorité des masculinistes, notamment des incels, se déclarent pour la légalisation du viol, même si ça enlève « l’excitation de l’acte ».
D’autant que ce serait aux femmes de faire attention à ne pas être violée. Car, après tout, les hommes ont des pulsions. Et ils ne peuvent pas s’arrêter durant l’acte.
Il y a aussi une apologie de l’inceste père-fille et de la pédophilie. Les masculinistes adhèrent notamment aux théories de Richard Gardner. Dénoncer l’inceste et la pédophilie serait, comme beaucoup de choses, une invention du féminisme.
Les atteintes aux droits des femmes
Au sein de certains groupes masculinistes, on appelle les femmes des « foid » pour « female humanoid » ou humanoïde femelle.
En effet, ils estiment que le mot « femme » donnerait de la considération et humaniserait les femmes qu’ils critiquent quotidiennement. Sur des forums, on peut, ainsi, lire que les femmes ne sont que des « corps vivants qui ne méritent pas de droits ».
Il y a donc une remise en question des femmes et de leurs droits. Cela concerne notamment le droit de vote, le droit à l’avortement, la suppression de l’autorité du père.
Les attentats
La violence masculiniste est allée plusieurs fois jusqu’à l’attentat. Des hommes ont tué des femmes qu’ils ne connaissaient pas, pour le simple motif qu’elles sont des femmes.
Un schéma répétitif
Le schéma des attentats est assez similaire à chaque fois.
Les hommes passant à l’acte sont souvent actifs sur les réseaux sociaux, et membres de forums masculinistes. Ils échangent longuement avec d’autres membres. Et parlent ouvertement de leurs projets.
Certains écrivent même des manifestes pour que leurs idées se pérennisent.
Après leurs féminicides, qui peuvent être espacés dans le temps, ils se suicident ou se rendent à la police.
En effet, le but n’est pas que leur acte reste anonyme mais bien que tout le monde en parle.
Et c’est là un des critères du terrorisme. Le but est de faire peur et de faire passer un message.
Une forme de terrorisme inquiétante
Les études sur le terrorisme montrent que le masculinisme et les mouvements conservateurs en général ont des dérives terroristes.
Les unités de lutte anti-terroriste montrent d’ailleurs que leur travail se concentre de plus en plus sur ces menaces.
Ils déjouent ainsi régulièrement des attentats masculinistes en Belgique et en Europe.
En juillet dernier, un jeune homme se revendiquant uniquement de la mouvance incel, a été arrêté à Saint-Etienne en France. C’est la première fois que le parquet anti-terroriste se saisissait d’un tel dossier.
Le masculinisme ne constitue donc pas seulement une menace pour les femmes, mais bien pour toute la société.
Comment lutter contre le masculinisme ?
Les adolescent.e.s
Une façon de limiter la progression du mouvement reste la sensibilisation. Cela passe par exemple par le fait de parler à son entourage, surtout aux adolescent.es. Car ce sont elles et eux qui ont le plus de risque de succomber à ces discours.
Sans contrôler ce que regardent les adolescent.e.s en ligne, il est important de discuter du sujet. Leur demander par exemple ce qu’ils/elles en pensent, s’ils/elles en ont déjà entendu parler, s’ils/elles voient beaucoup de ces vidéos.
Les personnes proches d’un groupe masculiniste
Si vous connaissez quelqu’un.e qui fait partie d’un groupe masculiniste, il vaut mieux en parler qu’éviter le sujet.
En effet, le recrutement dans ces groupes se repose énormément sur la solitude et la détresse émotionnelle.
Dès lors, montrer à cette personne qu’elle n’est pas seule et que la haine et la violence ne sont pas la solution est important.
Evidemment, il faut quand même se protéger. Si vous voyez que la personne a des discours violents qui met votre sécurité en danger, il vaut mieux arrêter la discussion.
Informer sur les dangers
Ensuite, il est important d’informer le plus de monde possible du danger que représente le masculinisme.
Déconstruire l’idée qu’il s’agit d’un équivalent du féminisme. Et dénoncer les violences qui en découlent.
Les conservateurs en politique essaient de faire passer le mouvement comme inoffensif et à la marge.
Mais, il est important que des voix se lèvent contre cela. Car le masculinisme tue chaque jour.
Ressources
Pour télécharger l’article en version PDF, cliquez ici : 2025.08.18_Masculinisme
Pour aller plus loin
Sources
Voici les sources qui m’ont permis de rédiger cet article.
- Men who hate women: the extremism nobody is talking about de Laura Bates
- La crise de la masculinité : autopsie d’un mythe tenace de François Dupuis-Déri
- Les antiféministes : analyse d’un discours réactionnaire de François Dupuis-Déri
- « Le « masculinisme » : une histoire politique du mot » de François Dupuis-Déri
- Contrer les discours masculinistes en ligne : rapport d’Equipop et de l’Institut du genre en géopolitique
- Article : Mascus confus