La pureté militante

Qu’est-ce que la pureté militante ?
Comment se définit la pureté militante ?
La pureté militante désigne une pression exercée dans certains milieux engagés : celle d’être un/une militant.e « parfait.e », irréprochable en toute circonstance. Cette idée repose sur l’exigence d’une cohérence totale entre les paroles, les actions et les principes d’un/une individu.e engagé.e. Toute contradiction ou maladresse peut alors être perçue comme une trahison de la cause, des principes que tu dis défendre.
Ce phénomène touche particulièrement les luttes féministes, écologistes ou LGBTQIA+. Dans ces contextes, certain.e.s militant.e.s attendent des autres qu’ils/elles soient aussi informé.e.s, aussi impliqué.e.s qu’eux/elles-mêmes. Or, ils/elles oublient que personne n’est parfait.e. Et qu’ils/elles ne font pas exception.
Pourquoi la pureté militante peut-elle poser problème ?
Cette exigence de pureté rend les espaces militants peu accueillants pour les personnes qui rentrent tout juste dans le militantisme, qui doutent, qui apprennent. Elle crée un climat de stress, de contrôle et de jugement. Certain.e.s n’osent plus poser de questions, d’autres quittent les collectifs. La diversité des parcours, pourtant essentielle pour enrichir une lutte, est étouffée.
Pourquoi ce phénomène s’impose-t-il ?
La pureté militante peut s’expliquer par un besoin de sécurité et de cohérence dans des luttes souvent marquées par des violences.
En effet, face à une réalité injuste, certain.e.s militant.e.s cherchent à créer des espaces « parfaits » où aucun comportement problématique ne serait toléré. Ce besoin est bien sûr compréhensible et légitime. Mais poussé à l’extrême, il peut malheureusement devenir contre-productif. Car, au lieu d’ouvrir un espace sécurisant, il crée un milieu plus fermé, où la parole semble contrainte. Et par conséquent, cela ajoute de la violence auprès de personnes qui en subissent déjà beaucoup.
Comment est utilisé le terme de « pureté militante » ?
Le terme « pureté militante » peut également s’utiliser de manière abusive. Des personnes accusées de propos sexistes, racistes, par exemple, peuvent répondre que la critique qu’elles reçoivent est un excès de pureté militante.
Cela permet alors d’éviter toute remise en question en retournant la faute sur les autres. Dans ces cas, l’expression devient un bouclier pour bloquer la discussion et maintenir des comportements problématiques. Or, cela n’est pas acceptable.
Toutes les critiques ne relèvent pas de la pureté militante. Certaines sont nécessaires. Elles permettent d’aligner nos actions avec nos valeurs. Ce qui pose problème, c’est quand la critique devient permanente, voire punitive. Il faut pouvoir distinguer une démarche de responsabilisation d’une logique d’exclusion.
Quels sont les effets de la pureté militante ?
La pression ressentie peut se traduire par des attentes irréalistes : militer tout le temps, tout savoir, ne jamais se tromper. Sans oublier d’utiliser parfaitement le bon mot. Cette pression favorise l’épuisement, surtout chez les personnes marginalisées qui n’ont pas toujours les moyens de répondre à ces exigences.
On retrouve alors une reproduction des logiques productivistes que le militantisme prétend combattre : être constamment visible, actif/active, utile. Celles et ceux qui ne peuvent pas suivre le rythme sont mis.e.s à l’écart ou culpabilisé.e.s.
Certes, l’objectif initial de la pureté militante vise à mener la lutte de la manière la plus juste possible. On veut être cohérent.e de bout en bout. Et cela implique une exigence sur soi-même de tous les instants.
Cependant, quand on oublie que l’humain.e est parfois défaillant.e, on créé, malgré soi, des espaces à l’exact opposé des « safe-places ». Un mot de travers, une maladresse ou une absence peuvent devenir des motifs d’exclusion. Cette culture de la pureté ne laisse pas de place à l’erreur, ni même à l’apprentissage. Elle empêche aussi l’émergence de nouvelles voix, essentielles au renouvellement des luttes.
Conclusion
Militer, c’est apprendre. Personne n’est parfait.e. Et tout le monde peut évoluer. Accueillir la diversité des parcours, accepter les erreurs, accompagner plutôt qu’exclure. Il ne s’agit pas de tout tolérer, mais de sortir d’une logique punitive. Un collectif représente aussi un espace de vie, d’émotions, de vulnérabilités.
On peut militer sans reproduire la violence. La lutte contre les oppressions reste un travail de long terme. Elle nécessite de la coopération, de la patience et de la solidarité. On avance mieux à plusieurs, même imparfait.e.s, que seul.e.
La critique politique reste évidemment essentielle, mais elle doit construire, pas détruire.
Mina Vantourout
Références juridiques
Loi
Ressources
A venir
Pour aller plus loin
- Marsault, E. D. (2023). Faire justice. Moralisme progressiste et pratiques punitives dans la lutte contre les violences sexistes. La Fabrique.
- Lopez, Clément. « La pureté militante : le piège de la vertu ? », Sismique, 28 mai 2025.
- Lopez, Clément. « La pureté militante : une nécessité ? », Sismique, 28 mai 2025.