La place des sages-femmes dans la prise en charge des victimes de violences sexuelles

Dans l’article qui suit, nous allons parler des sages-femmes. Plus particulièrement, nous allons voir le rôle qu’elles peuvent jouer auprès des victimes de violences sexuelles.

Sages-femmes et victimes de violences sexuelles

Introduction

Beaucoup de professionnel.le.s sont habilité.e.s à prendre en charge les victimes de violences sexuelles. Par exemple, il peut s’agir des médecins, des infirmiers/infirmières légistes, des psychologues, des psychiatres, pour ne citer qu’elles/eux.

Mais qu’en est-il des sages-femmes ? Quelle est leur place dans cette prise en charge ? Sont-elles assez formées ?

Les violences sexuelles : qu’est-ce que c’est ?

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit les violences sexuelles comme ceci.

« La violence sexuelle se réfère à tout acte sexuel, tentative d’acte sexuel ou tout autre acte exercé par autrui contre la sexualité d’une personne en faisant usage de la force, quelle que soit sa relation avec la victime, dans n’importe quel contexte. »

La place des sages-femmes dans le dépistage des violences sexuelles

Les sages-femmes jouent un rôle important dans le dépistage des violences sexuelles et conjugales.

En effet, elles accompagnent les femmes dans leur parcours de parentalité. Et elles occupent une place privilégiée, notamment pendant la grossesse. De fait, il s’agit d’un moment clé de la vie d’une femme.

Au cours de cet accompagnement, elles instaurent une relation de confiance. Celle-ci favorise les confidences. D’autant plus lorsqu’elles se rendent au domicile des patientes. Elles deviennent, alors, des interlocutrices essentielles pour soutenir, écouter, orienter et accompagner ces femmes.

De plus, selon plusieurs études, les sages-femmes ont tout à fait leur place dans le dépistage de ces violences. Environ 90 % des personnes interrogées approuvent cette idée.

Les sages-femmes jouent donc un rôle clé dans le dépistage de ces violences. En effet, elles peuvent aider ces femmes, si elles le désirent, à trouver une démarche de soin ou d’aide qui leur convient.

Les sages-femmes sont donc toutes à fait compétentes, par leur lien avec les femmes, pour dépister ces violences.

Cependant, les sages-femmes sont aussi des professionnelles tout à fait qualifiées pour un accompagnement plus approfondi des victimes.

La place des sages-femmes dans l’accompagnement des victimes de violences sexuelles

Les victimes de violences sexuelles ne sont pas des patientes comme les autres. Et elles méritent une attention particulière de leur besoin.

Les besoins des victimes

A ce sujet, il existe une étude intitulée « Femmes victimes de violences sexuelles : attitudes attendues de la part de leur médecin ». Elle met en évidence les comportements et les actions attendus du/de la médecin généraliste lors de la prise en charge des victimes de violences sexuelles.

Par exemple, les femmes souhaitent être entendues. De plus, elles ne veulent pas voir de remise en cause de leur statut de victime. Elles ont également besoin d’être orientées vers d’autres professionnel.le.s (psychologues, psychiatres) ainsi que vers des associations ou groupes de parole.

En outre, les victimes de violences sexuelles attendent qu’on respecte leur consentement. Et elles souhaitent surtout savoir qu’elles peuvent s’en sortir.

Or, les sages-femmes sont tout à fait aptes à leur apporter cela.

Le code de déontologie international des sages-femmes

Le code de déontologie international des sages-femmes prévoit la chose suivante.

« Les sages-femmes répondent aux besoins psychologiques, physiques, émotionnels et spirituels des femmes qui recherchent des soins médicaux, quelle que soit leur situation (non-discrimination). »

Elles sont donc formées à une prise en charge globale des patientes, au-delà du simple aspect physique. Elles sont également formées à l’importance primordiale du consentement. Ainsi, elles veillent à son respect en toutes circonstances.

Ces pratiques rejoignent le besoin des patientes d’être entendues et crues.

Par ailleurs, le code précise également le point suivant. 

« Les sages-femmes travaillent avec d’autres professionnel.le.s de la santé en faisant preuve de respect à leur égard et les consultent ou transfèrent, si nécessaire, les patientes dont la prise en charge dépasse leurs compétences. »

Les sages-femmes ont donc une solide expérience du travail en pluridisciplinarité. En effet, elles collaborent étroitement avec des gynécologues, des psychologues et d’autres professionnel.le.s de santé.

Et lorsqu’une situation dépasse leurs compétences, elles ont l’habitude de déléguer. Cela leur permet d’assurer une prise en charge optimale des patientes. 

Les sages-femmes légistes

Les sages-femmes légistes sont des professionnelles ayant suivi une formation complémentaire pour accompagner les victimes de violences sexuelles.

Elles peuvent travailler dans des centres de prise en charge des violences sexuelles (CPVS), par exemple.

Ces sages-femmes sont spécialement formées pour réaliser des examens gynécologiques des victimes.

Elles ont une excellente connaissance du corps féminin. Grâce à cela, elles savent dispenser des conseils adaptés d’éducation à la santé.

Elles peuvent aussi prendre en charge les familles de manière systémique. Pensons par exemple aux situations de violences pédiatriques.

Enfin, elles peuvent également gérer les mesures préventives. De plus, les sages-femmes peuvent évaluer les risques encourus par les victimes de violences sexuelles.

Les sages-femmes et les victimes d’inceste

L’inceste fait partie des violences sexuelles. En France, on estime qu’au moins un enfant sur dix en est victime. Mais, selon l’O.M.S., 20 à 24 % des filles subissent des violences sexuelles avant l’âge de 18 ans. Et elle évalue que cela concerne 5 à 11 % des garçons, toujours avant l’âge de 18 ans.

Or, ces enfants grandissent et certains deviennent parents.

Le rôle des sages-femmes est alors crucial. En effet, le désir de grossesse, la grossesse elle-même, l’accouchement ou la parentalité peuvent raviver des traumatismes enfouis. Cela peut arriver tant chez les mères (ou co-mères) que chez les pères.

Les sages-femmes peuvent alors être des personnes ressources pour accompagner ces femmes.

Certaines d’entre elles expriment la peur de reproduire des actes déviants ou d’avoir des pensées inappropriées envers leur propre enfant. Ainsi, elles craignent que ces traumatismes soient ancrés en elles.

Les sages-femmes sont alors une aide précieuse.  En effet, elles peuvent les aider à traverser ces étapes dans l’écoute et la compréhension.

Les sages-femmes sont-elles suffisamment formées ?

Durant les études de base

Durant leurs études, les étudiant.e.s en formation de sage-femme sont sensibilisé.e.s au sujet des violences sexuelles à travers divers cours. Certains leur sont même entièrement dédiés.

Au début de leur formation, les étudiant.e.s reçoivent un référentiel de compétences. Ce dernier reprend l’ensemble des compétences nécessaires pour devenir sage-femme. Dans ce référentiel, figure notamment la compétence suivante.

Compétence 6 : Réaliser une démarche de promotion et d’éducation pour la santé individuelle et collective

    1. Identifier les besoins, les ressources et les représentations du public cible.

    2. Concevoir des stratégies pédagogiques et psycho-affectives adaptées.

    3. Mettre en œuvre les interventions en fonction des besoins identifiés.

    4. Évaluer et réajuster le processus et/ou les stratégies mises en œuvre durant et après l’intervention.

Il ne s’agit là que d’une compétence parmi toutes celles que les étudiant.e.s doivent apprendre à développer.

Certes, cette compétence ne traite pas spécifiquement des violences sexuelles. Pourtant, les sages-femmes qui l’acquièrent deviennent alors les partenaires des patientes dans leur prise en charge. Dès lors, elles remplissent leurs besoins, en les adaptant au fur et à mesure.

Notons qu’il s’agit là d’une évolution récente des études de sages-femmes. Femmes de Droit souligne cette avancée nécessaire et salutaire.

Une formation plus approfondie

Cependant, une formation plus approfondie sur la détection et la prise en charge des victimes pourrait être envisagée.

En effet, rappelons que l’on estime qu’une femme sur quatre est victime de violences sexuelles. Par conséquent, les sages-femmes y sont inévitablement confrontées au cours de leur carrière.

Toutefois, certaines peuvent se sentir démunies face à cette situation.

Dès lors, une formation plus poussée sur la prise en charge des violences sexuelles et conjugales leur permettrait de mieux se préparer et d’offrir un accompagnement optimal aux patientes.

De plus, il est également essentiel de se former à la psychotraumatologie et de savoir en identifier les symptômes. En effet, cela permet d’éviter que les patientes ne restent dans l’errance et de les orienter vers des professionnel.le.s adapté.e.s.

Conclusion

Les sages-femmes développent de nombreuses compétences au cours de leur formation et de leurs stages. Cela leur permet d’assurer la prise en charge des femmes victimes de violences sexuelles.

Les sages-femmes peuvent alors devenir les personnes de confiance vers qui se tourner et qui sauront à leur tour se tourner vers d’autres professionnel.le.s en cas de besoin.

Elles sauront aussi leur proposer un accompagnement le plus optimal possible et devenir des personnes pleines de ressources intarissables vers qui aiguiller.

Rappelons que les sages-femmes sont les partenaires privilégiées des femmes pour garantir leur santé. Soutenons-les. Et militons pour qu’elles reconnues à leur juste valeur par les pouvoirs publics.

Alwen Baert

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