Grossesse pour autrui (G.P.A.)

GPA : grossesse pour autrui ou gestation pour autrui

Définition

La G.P.A. est une gestation pour autrui aussi appelée grossesse pour autrui.

Il s’agit d’une méthode de procréation par laquelle une femme (appelée « mère porteuse ») porte l’enfant d’un couple ou d’une personne seule (appelés les parents d’intention) dans le but que ce.s dernier.s l’éduque.nt.

Méthodes

Il existe deux façons de procéder à une G.P.A. : une nommée « de basse technologie » et une autre « de haute technologie ».

Dans le premier cas, la mère porteuse (aussi appelée mère de subsitution) s’insémine seule. Cela peut, par exemple, se faire au moyen d’une pipette qui permet d’injecter le sperme dans la paroi vaginale. C’est donc l’ovule de la mère porteuse qui sera utilisé.

Dans le second cas, la fécondation a lieu par procréation médicalement assistée.

L’embryon obtenu par fécondation in vitro a pour origine les gamètes (ovocyte et spermatozoïde) des parents d’intention. Ces gamètes peuvent également être issus de dons.

Qui sont les personnes qui ont recours à la G.P.A. ?

Dans certains couples, la femme est infertile. Parfois, elle présente des problèmes médicaux qui l’empêchent de porter un enfant. Dans ce cas, certains choisissent de recourir à la grossesse pour autrui.

Il peut également s’agir de couples d’hommes qui font appel à cette pratique pour avoir un enfant qui possède le matériel génétique d’au moins un des deux pères.

Situation légale dans le monde

Cette pratique médicale est interdite dans certains pays comme la France ou l’Italie, par exemple. D’autres pays, comme la Grande-Bretagne, l’autorisent sous certaines conditions, notamment en réservant la G.P.A. à ses résident.e.s.

Aux États-Unis, certains états l’interdisent et d’autres l’autorisent complètement. La particularité des Etats-Unis, mais aussi d’autres pays comme la Russie ou l’Ukraine, est que la mère porteuse peut être payée.

Et en Belgique ?

Une tolérance légale

En Belgique, la G.P.A. est tolérée. C’est-à-dire qu’aucune loi ne l’interdit mais aucune loi ne l’autorise non plus. Et comme tout ce qui n’est pas interdit est permis, la G.P.A. est admise en Belgique.

La conséquence de cette absence de loi sur la question est que ce sont les hôpitaux eux-mêmes qui émettent leurs propres règles, dans le respect de lois et principes déjà existants comme l’impossibilité de rémunérer le corps humain.

C’est donc différent qu’aux États-Unis où les mères porteuses peuvent recevoir de l’argent pour porter l’enfant d’autrui.

Etapes de la G.P.A.

Dans la situation actuelle que connaît notre pays, les parents d’intention doivent trouver eux-mêmes la mère porteuse.  Cette dernière est souvent une personne proche de leur entourage (une sœur, une amie, …).

Cette femme doit avoir au moins enfanté une fois et avoir vécu des grossesses normales.

Lorsque c’est la GPA de haute technologie qui est choisie, cette femme ne devra avoir aucun lien génétique avec l’enfant qu’elle va porter pour autrui. Elle ne peut donc donner ses propres ovocytes. Ceci implique donc pour un couple d’hommes, par exemple, d’entamer des recherches d’ovocytes auprès de banques de dons.

Insécurité juridique ?

En l’absence de cadre légal, les parents d’intention se retrouve sans protection si la mère porteuse décide de ne pas « donner » l’enfant. Cependant, en pratique, le cas ne s’est encore jamais présenté.

En outre, à l’heure actuelle, pour établir le lien de filiation entre l’enfant et les parents d’intention, l’enfant doit être adopté par l’un.e d’eux.

Pourquoi ? En droit, il y a un principe qui dit : la mère est toujours certaine. Cela veut dire que la mère d’un enfant est toujours celle qui a accouché de celui-ci. La mère porteuse est donc présumée être la mère de l’enfant. Le nom de celle-ci est inscrit sur l’acte de naissance de ce dernier.

C’est pour cette raison que l’un.e des parents d’intention, au minimum, doit entamer des démarches pour adopter l’enfant. L’autre parent pourra simplement reconnaître l’enfant après sa naissance.

Conséquences

Cette absence de cadre légal dans notre pays pousse parfois les futurs parents à se tourner vers l’étranger pour réaliser une GPA dans un pays où cette pratique est légale et encadrée.

Vers un encadrement par la Belgique ?

La situation est en train de changer en Belgique. Plusieurs partis politiques souhaiteraient légiférer sur la G.P.A. En effet, ils proposent d’offrir plus de sécurité juridique aux parents d’intention en permettant à ceux-ci que leur lien de filiation avec leur enfant soit automatiquement établi après la naissance. Autrement dit, il n’y aurait plus besoin d’entamer une procédure d’adoption pour l’un.e des parents d’intention.

Proposition de loi sur la grossesse pour autrui de 2019

Ainsi, une proposition de loi a été déposée en 2019. Elle ne concernerait que l’encadrement de la maternité de substitution de haute technologie. Les cas où la mère porteuse s’inséminerait seule ne seraient pas visés par ce projet de loi (maternité de substitution de basse technologie).

Ce que semble redouter les personnes qui souhaitent légiférer sur la question serait le risque que la mère porteuse s’ « approprie » « le matériel génétique » des parents d’intention. Autrement dit, que la mère porteuse refuse de « donner » l’enfant une fois qu’elle a accouché de celui-ci.

Avec cette loi, verrait le jour une nouvelle procédure de filiation ainsi que la possibilité de rédiger une convention entre la mère porteuse et les parents d’intention afin de garantir une plus grande sécurité juridique. Cela dans le but, in fine, d’empêcher la femme de revenir sur sa décision.

La G.P.A. : un débat sociétal

Le débat qui agite la question de la G.P.A. depuis des années dans nos pays occidentaux démontre comment cette pratique pose des questions sur le plan moral et éthique.

Une grossesse pour autrui « éthique »

Les défenseur.e.s de la gestation pour autrui se parent alors de la possibilité d’une « gestation pour autrui éthique ». Cela leur permet de justifier la légalisation de cette matière.

Mais qu’est-ce qu’une G.P.A. éthique et est-ce possible ?

Tout d’abord, essayons de dessiner les contours d’une G.P.A. éthique.

Aujourd’hui on distingue la G.P.A. dite altruiste et la G.P.A. commerciale. Dans le premier cas, cela signifie que cette pratique n’est pas commercialisée. Donc la mère porteuse ne reçoit pas de rétribution mais simplement des dédommagements. C’est le cas en Grèce ou au Royaume-Uni où seule la G.P.A. « altruiste » est autorisée par la loi.

En Russie et en Ukraine, en revanche, la G.P.A. commerciale est complètement autorisée : là-bas, les femmes reçoivent de l’argent en contrepartie de leur « service ».

La G.P.A. éthique se ferait donc avec altruisme de la part de la mère porteuse. Celle-ci ne demandant que des dédommagements et des remboursements des frais médicaux, des frais de déplacement, etc.

Une autre condition présentée comme la garantie d’une G.P.A. éthique serait la possibilité pour l’enfant d’accéder à l’identité de la femme qui l’a porté.

Une réelle éthique ?

Malgré toutes ces « garanties » avancées par les pro-G.P.A., une gestation pour autrui éthique est-elle réellement possible ?

Pour Sylviane Agacinski, philosophe kantienne, parler d’une G.P.A.  éthique « c’est aussi absurde que de parler d’esclavage éthique ».

Pour elle, il ne peut exister de G.P.A. « éthique » puisque par essence elle est soumise à rémunération. Que ce soit sous forme de rétribution ou de dédommagements, tous les pays qui l’autorisent prévoient une sorte de rémunération pour la mère porteuse.

Cela donne l’idée qu’on peut louer une femme pendant 9 mois et acheter un enfant à la naissance. On assiste donc, avec la G.P.A., à l’instrumentalisation du corps des femmes et à la chosification de l’enfant.

D’ailleurs, on observe, dans le projet de loi déposé en 2019, l’utilisation de termes tels que « céder », ce qui reviendrait à associer l’enfant à une chose alors que c’est une personne.

Le problème reste tout entier même si on décidait de ne pas rémunérer les femmes. Car dans cette hypothèse-là, l’exploitation du corps féminin serait complètement visible et cette démarche serait profondément antiféministe. La femme verrait son corps utilisé pour le bonheur des autres sans même en tirer un bénéfice.

Une convention pour protéger qui ?

Allons plus loin encore dans la réflexion : cette proposition de loi invite les parties à rédiger une convention. Celle-ci vise à établir clairement les droits et obligations de chacun.e.

Cependant, on aperçoit très vite que rédiger une convention pour encadrer cette pratique violerait tous les principes fondamentaux d’indisponibilité du corps ! L’enfant ne serait plus qu’un produit de fabrication et la femme, le moyen de production.

Comment, à partir de ce constat, peut-on affirmer qu’il existe une GPA éthique ?

Et les droits de l’enfant ?

Prenons le problème d’un autre point de vue : celui des droits de l’enfant et de son intérêt supérieur.

Même s’il a accès, à un moment de sa vie, à l’identité de la femme qui l’a porté et mis au monde, il n’en reste pas moins que le lien qui s’est établi entre la mère et l’enfant pendant la grossesse est complètement nié, à l’heure pourtant où l’on connait toute l’importance des échanges qui sont effectués entre la mère et l’enfant durant la grossesse.

Ce lien qui se créé naturellement serait complètement brisé dès la naissance du bébé. Et on ose affirmer que cela n’aura aucune conséquence sur l’enfant ou sur la femme qui lui a donné la vie ?

Grossesse ou gestation ?

En outre, dans le texte, on ne parle même plus de grossesse mais de « gestation ». Or, ce terme dépersonnalise complètement ce moment-clé de la vie autant pour la femme que pour l’enfant. Ce terme en dit beaucoup sur la dépersonnalisation que représente la GPA, étant donné que le mot gestation est un mot utilisé pour les animaux et non pour les humains. Même dans son appellation, on cherche à enlever toute humanité de cette pratique pour bien insister sur le fait que la mère ne serait que le « récipient » contenant un enfant qui ne serait en aucune manière le sien.

Un autre terme proposé est celui de « maternité de subsitution ». Il ne nous convainc pas plus. En effet, on ne peut limiter la maternité à la grossesse et à l’accouchement. Du reste, les mères d’intention ne seront pas moins des mères, vivant leur maternité.

Constat

Le constat est là : peu importe comment on envisage la question de la G.P.A., il est évident que quelque chose ne va fondamentalement pas dans cette pratique.

Autoriser cette pratique médicale comme prévu dans le projet actuellement en discussion reviendrait à faire un bond de 50 ans en arrière pour le droit des femmes mais aussi celui des enfants.

Le problème est double pour les femmes. D’une part, cette proposition de loi essentialise les femmes dans une position de « mères gestatrices », les emprisonne dans leur faculté à porter la vie en apportant le message qu’une femme est avant tout un ventre qu’on peut louer. D’autre part, la législation sur la G.P.A. piétine leur vécu quand celles-ci portent un enfant, réduisant ce moment de la vie à une simple gestation sans émotion ni implication pour elle.

C’est assez spectaculaire de voir que la G.P.A. est capable des deux à la fois. Dans cette pratique, l’enfant est complètement objectifié. Il devient l’objet d’un contrat alors que c’est un sujet de droits, s’il est encore nécessaire de le rappeler.

Conclusion

Le but recherché ici n’est pas de nier la souffrance des couples en mal d’enfants et qui souhaiteraient recourir à cette pratique. En effet, cela nous semble être une souffrance totalement légitime.

En revanche, on peut se poser la question, tout aussi légitime, du prix auquel ce désir d’enfants se réalise, à savoir l’instrumentalisation du corps des femmes et la chosification de l’enfant.

Que faut-il faire alors ? Légiférer ? Interdire ?

Peut-être que rester sur le statu quo de la situation qu’on connait aujourd’hui dans notre pays ne serait pas une mauvaise idée et serait même souhaitable.

Il semble que la G.P.A. comme elle se déroule actuellement ne pose pas beaucoup de problèmes. La plupart des expériences sont positives et puisqu’elles se déroulent dans un cadre privé, la mère porteuse ainsi que l’enfant gardent souvent un lien après la naissance.

Cependant, il serait souhaitable pour les partis politiques de se pencher sur l’état actuel de notre droit en matière d’adoption ou d’accueil familial. Car ces deux domaines présentent beaucoup de soucis entravant les démarches des couples qui souhaitent devenir parents autrement.

Le désir d’enfant est légitime tout comme le désir pour des enfants placés, abandonnés et en manque de parents d’avoir une famille est légitime.

Avant de vouloir absolument des enfants à soi, qui sont génétiquement les nôtres, n’oublions pas qu’aujourd’hui, dans notre pays, beaucoup d’enfants n’ont pas la chance de grandir auprès de parents aimants et présents.

Alors pourquoi ne pas faciliter les démarches pour que ces deux désirs se rencontrent ?

Les autorités doivent mettre en place une politique de promotion de l’adoption en insistant sur le fait que ces enfants ne sont pas des sous-enfants ou des enfants moins légitimes d’être aimés car il n’y a aucun lien de sang.

Elise Hawotte

Avec le soutien de

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