Viol

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Avant-propos

Il est crucial de rappeler avant de lire cet article que :  

«  Le viol n’est jamais causé par la victime » mais « le viol est causé par le violeur ». 

Amnesty 

La notion de viol

La définition dans le code pénal belge 

Grâce à une loi du 18 mars 2022 à l’initiative du ministre fédéral de la justice Van Quickenborne ainsi qu’aux nombreux mouvements féministes, le code pénal a pu être reformé sur le chapitre des violences sexuelles.  

Dans cet esprit, la définition du viol se définit aujourd’hui de la manière suivante à l’article 417/11 :

« tout acte qui consiste en ou se compose d’une pénétration sexuelle de quelque nature et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne ou avec l’aide d’une personne qui n’y consent pas.

Cette infraction est punie de la réclusion de dix ans à quinze ans.« 

Dès lors, on entend par viol la pénétration sexuelle par un autre sexe mais aussi par des objets.

Plus précisément, on considère la pénétration comme sexuelle si elle a lieu dans un orifice sexuel. Ainsi, on entend pas orifice sexuel le sexe, l’anus et la bouche.

L’historique de la définition  

Il faut savoir que cette définition s’inspire du code pénal belge de 1867. Ce dernier s’inspirait lui-même du code pénal de Napoléon de 1810.

D’ailleurs, la notion de viol proche de la nôtre n’a pas toujours été la même. Elle a compté de multiples changements au cours des dernières années et au cours des pensées sociétales pour arriver à celle d’aujourd’hui. 

Avant 1867

Il fut un temps, avant le code pénal de 1867, où la définition de viol était quelque peu légère, voire inexistante.

Le législateur pensait à la protection de la paix familiale. Celle-ci passait avant la protection de l’intégrité sexuelle. On voulait éviter les atteintes à la morale, à l’honneur ou à la décence.  

Entre 1867 et 2022

Depuis, entre le code de 1867 et le code de 2022, la définition n’a guère changé. Hormis deux notions extrêmement importantes : l’inceste et le consentement. 

C’est en effet seulement en 1982 (loi du 2 juillet 1982) et en 2022 (loi du 21 mars 2022) que la définition juridique du mot « viol » a été mise à jour. Cette définition inclut désormais ces deux notions précitées.

Cet ajustement a eu lieu afin de spécifier le « viol » pour que la Justice puisse mieux en tenir compte. De plus, la nouvelle définition correspond mieux aux mœurs d’aujourd’hui.  

Dans l’ancien droit belge

Concrètement, jusqu’au 1er juin 2022, le viol se définissait en Belgique  à l’article 375 du Code Pénal.

« tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne qui n’y consent pas »

Cet article précisait encore, en son alinéa 2, que la personne n’était pas consentante notamment lorsque l’acte avait été imposé par la violence, la contrainte ou la ruse, ou encore, lorsque l’acte avait été rendu possible suite à une infirmité ou à une déficience physique ou mentale de la victime.

Sanction pénale du viol

Le viol constitue un crime. Le Code pénal belge prévoit une peine de réclusion de 10 à 15 ans de prison.

Il faut noter que le Code pénal prévoit également des circonstances aggravantes au viol. Ces circonstances augmentent alors la peine encourue.

Les stéréotypes autour des viols 

Les viols prototypiques et les non prototypiques 

Tout le monde a connaissance du crime du viol. Pourtant, il reste tabou dans notre société actuelle. 

Précisément, il constitue une atteinte grave à la personne et aux mœurs qui est difficile à concevoir pour l’être humain. 

On peut distinguer le viol selon plusieurs critères. Cela permet alors de définir des catégories. Même si, je le rappelle, un viol reste un crime et est puni par la loi.

Mais ces catégories permettent de différencier les situations, les auteurs, et de mettre un nom sur les différentes réactions des personnes face à un viol.  

Il s’agit des viols prototypiques et non prototypiques.  

D’après les auteur.rice.s Anna Bayard-Richez, Julien Teyssier, et Patrick Denoux, dans le Mémoire « Prototypicité du viol et impact sur la victime : une revue de questions » la prototypicité se définit comme telle :  

« Ensemble d’informations catégorielles répondant aux représentations partagées par un groupe. Dans le cas du viol par exemple, le viol prototypique serait perpétré par un inconnu généralement de nuit, la victime serait séduisante et se défendrait activement. Un viol non prototypique pourrait ainsi être un viol par un mari, ou après un refus de port de préservatif, ainsi qu’une multitude de déclinaisons qui ne répondent pas au stéréotype que nous avons de l’agression sexuelle. » 

La prototypicité permet de mettre des mots sur les stéréotypes que l’on connait du viol. 

La banalisation du viol  

On appelle ces idées déjà conçues des « prototypicités ». Elles contribuent à diffuser à travers la société des idées inexactes et parfois mensongères sur le viol.

De ce fait, cela partage une représentation erronée du viol parfois fatale pour la victime.  

Par exemple, une personne envisage peu la possibilité d’être victime d’un proche. Par conséquent, elle repère les signes d’alerte beaucoup plus tard.

En revanche, une personne seule dans la rue, le soir, s’imaginera plus facilement être victime de violence de la part d’un inconnu. 

Cela est grave car la personne baisse sa garde à cause de ces stéréotypes sur le viol alors qu’elle pourrait être potentiellement en danger. 

Voici une citation du même mémoire :  

« Pourtant les viols non prototypiques sont banalisés : par les victimes elles-mêmes, « ce n’est pas un “vrai” viol », mais également par les institutions de recherche qui ne les prennent pas en compte dans leurs statistiques, par les médias ou encore par la police, refus de dépôt de plainte, et la justice, classement sans suite, déqualification du crime en délit. » 

De plus, un grand nombre de victimes ne déposent pas plainte. Elles sont sous-écoutés et trop souvent ne sont pas crues. Elles peuvent minimiser les actes par honte, déni, peur ou dégout.

Mais, le plus souvent, ce sont l’entourage, la police, les professionnel.le.s qui tiennent responsable la victime en trouvant mille et une excuses aux violeurs et en dénigrant la victime par ses vêtements, son physique, son caractère ou encore son comportement. 

Les répercussions désastreuses du viol  

Les sentiments des victimes  

Les victimes de viol sont envahies de sentiments négatifs pendant et après l’infraction commise 

En effet, la plupart ressentent de la peur, de la honte, du dégoût, de l’humiliation, de la souffrance physique et morale.

Et puis, les victimes ont tendance à s’isoler face à l’abandon de leur entourage et de certain.e.s professionnel.le.s.

Cela est encore plus fréquent lors d’inceste, sujet toujours tabou aujourd’hui.  

D’autant plus, ces sentiments peuvent ressurgir à chaque flashback, à chaque remémoration et à chaque parole.

Non seulement, ils sont intimement liés au traumatisme vécu mais ils peuvent aussi perdurer dans le temps.

Enfin, pour lutter contre, un travail psychologique et thérapeutique est nécessaire. 

Malgré tout, cela peut malheureusement conduire à des psychotraumatismes plus tard. 

Les conséquences physiques, psychologiques et sociales  

Ensuite, les victimes/survivant.e.s de viol font face à des conséquences d’ordre physique, psychique et sociale. 

Les conséquences physiques

En premier lieu, les conséquences physiques se marquent par des douleurs chroniques, fatigue intense, maux de tête, troubles digestifs et gynécologiques, palpitations, affections neurologiques, etc.  

Les conséquences psychologiques

Également, les conséquences psychologiques se distinguent par des confusions, baisse de l’estime de soi, sentiment de honte, anxiété, stress post-traumatique, hypervigilance, dépression, troubles obsessionnels du comportement (TOC), comportements alimentaires perturbés, amnésie traumatique totale ou partielle concernant l’agression, etc. 

Les conséquences sociales

En dernier lieu, les conséquences sociales s’orientent autour de l’isolement social, de la rupture avec la famille, du manque de confiance en soi et envers les autres comme l’établissement d’une relation à l’autre, ou encore des difficultés professionnelles, etc. 

Les conséquences sur la santé

Dans les cas les plus graves, cela peut conduire à des auto-comportements très dangereux pour leur santé. On retrouve l’usage excessif de drogue et d’alcool (addiction), ou encore des mutilations corporelles qui peuvent mener à des suicides.  

Enfin, les violences sexuelles peuvent donc entraîner des conséquences sur le long terme affectant durablement la santé physique et psychiques des individus, notamment en lien avec le stress intense qu’elles génèrent (PTSD). 

Le parcours difficile de reconstruction  

Sans justice, les victimes se sentent démunies et abandonnées par la société.  

Effectivement, les classements sans suite (par manque de preuve généralement) sont majoritaires dans les affaires de viol. 

Peu nombreuses sont celles qui réussissent à avoir justice. Selon les chiffres officiels : 53% des cas de viol sont classés sans suite en Belgique en 2020.  

Par ailleurs, en 2014, la police judiciaire fédérale a enregistré 2.882 viols. Or, la plupart des viols ne sont pas déclarés à la police. C’est d’ailleurs une information confirmée par S.O.S. Viol.

De ce fait, quand la justice est défaillante en matière de viol, cela aggrave le parcours de reconstruction des victimes.

La victime n’a pas de reconnaissance sociale et judiciaire. Cela est très difficile à digérer. 

D’ailleurs, il est terriblement compliqué pour les victimes de se remettre d’une agression quand l’agresseur.e est toujours en liberté. Il/elle peut à tout moment récidiver. Cela engendre un état de stress permanent pour la victime.  

Elle doit alors commencer un travail personnel thérapeutique pour guérir du traumatisme. 

Pour conclure, sans justice, la victime ne reçoit pas de traitements psychologiques de l’Etat. Ses soins sont à ses propres frais, souvent inaccessible pour la victime…   

Le consentement

Le consentement au centre de la réforme du code pénal sexuel belge 

Le consentement a longtemps été absent dans la définition du viol. En effet, les stéréotypes vu précédemment ont encouragé (et encouragent encore) fortement la banalisation du viol et surtout la faute des victimes.

De ce fait, la notion de consentement n’existait pas légalement. Cela justifiait très souvent le viol comme un acte provoqué et voulu par la victime.  

Or cela est complètement faux. 

Aujourd’hui, la notion de consentement tient une place centrale dans la définition de viol. 

En effet, désormais, le droit belge définit clairement le consentement. En outre, cette définition va plus loin que celle retenue par les Cours et tribunaux jusqu’ici.

La définition belge du consentement

Voici la définition du consentement en matière de droit à l’autodétermination sexuelle (Art. 417/5.) : 

« Le consentement suppose que celui-ci a été donné librement. Ceci est apprécié au regard des circonstances de l’affaire. Le consentement ne peut pas être déduit de la simple absence de résistance de la victime. Le consentement peut être retiré à tout moment avant ou pendant l’acte à caractère sexuel. 

Il n’y a pas de consentement lorsque l’acte à caractère sexuel a été commis en profitant de la situation de vulnérabilité de la victime due notamment à un état de peur, à l’influence de l’alcool, de stupéfiants, de substances psychotropes ou de toute autre substance ayant un effet similaire, à une maladie ou à une situation de handicap, altérant le libre arbitre. 

En tout état de cause, il n’y a pas de consentement si l’acte à caractère sexuel résulte d’une menace, de violences physiques ou psychologiques, d’une contrainte, d’une surprise, d’une ruse ou de tout autre comportement punissable. 

En tout état de cause, il n’y a pas de consentement lorsque l’acte à caractère sexuel a été commis au préjudice d’une victime inconsciente ou endormie. » 

Par ailleurs, la loi prévoit qu’avant 14 ans, l’enfant ne peut JAMAIS donner son consentement.

En outre, entre 14 et 16 ans, il ou elle ne peut consentir que s’il n’y a pas plus de 3 ans d’écart avec son ou sa partenaire ou que si le ou la partenaire est mineur.e.

Enfin, on considère le viol qui a lieu dans la sphère familiale comme de l’inceste jusqu’à la majorité de la victime. Pour les victimes majeures, le Code parle de violences sexuelles intrafamiliales.

L’absence de consentement dans le code pénal français  

Contrairement à ses voisins belges, le code pénal français n’inclut pas la notion du consentement. En effet, la définition du viol à l’article 222-23 du code pénal est celle-ci :  

 « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise ». 

On ne parle pas de consentement. 

Le consentement n’est d’ailleurs défini nullement autre part dans le code pénal français.

Quelques chiffres sur le viol en Belgique  

Amnesty International Belgique a publié un dossier édifiant sur le viol. Selon ces chiffres, voici quelques informations pertinentes.

                                                          

Ce dossier révèle également de nombreux stéréotypes.

Enfin, si on se réfère aux chiffres « officiels » du nombre de plaintes pour viol en Belgique, on peut faire le graphique suivant.

Notons cependant que ces chiffrent nous semblent bien étranges et restent inférieurs aux nombre de cas réels.

Clérice Delseray et Miriam Ben Jattou

Références juridiques

  • Code pénal : art. 417/11

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