Live Twitch syndrome d’aliénation parental

Le syndrome d’aliénation parentale : c’est quoi ?

Le syndrome d’aliénation parentale décrit une manipulation des mères sur leurs enfants contre l’autre parent, le père. Elles inventeraient des fausses accusations de violences (sexuelles ou autres) dans le but de faire du mal à l’autre parent et d’instrumentaliser l’enfant contre son parent[1]. Cette théorie est souvent utilisée par les hommes violents.

Ce syndrome vient de Richard Gardner, homme darwiniste et évolutionniste. L’homme était un psychiatre américain, né en 1931 à New York et décédé en 2003. Le syndrome d’aliénation parentale qu’il a inventé n’a en fait rien d’un syndrome à proprement parler. Il n’a d’ailleurs pas mené d’études scientifiques sur le sujet, et se base presqu’uniquement sur ses propres écrits passés. Il a créé sa théorie de toutes pièces, et a décidé de l’appeler syndrome pour paraitre plus crédible. A l’époque, début des années 80, les journaux scientifiques américains avaient d’ailleurs refusé de publier sa théorie car elle n’avait aucune base scientifique. Néanmoins, sachant que sa théorie est toujours utilisée aujourd’hui, Gardner a eu une bonne idée.

Une théorie approuvée ?

Le syndrome d’aliénation parentale est pourtant décrié par de grandes organisations telles que l’OMS[2], l’UE[3], le Conseil de l’Europe. Même aux Etats-Unis, pays d’origine de Gardner, cette théorie est décriée. Malgré cela, la Belgique forme ses psychologues, ses magistrats, ses policiers à la question du syndrome d’alinéation parentale. Pour nous, c’est révoltant. Nous l’avons d’ailleurs signalé à l’Institut de formation de la magistrature. 

Un médecin qui continue d’écrire sur le sujet d’aliénation parentale en allant dans le sens de Gardner est, entre autres, Jean-Emile Vanderheyden. Il a écrit l’ouvrage « Les séparations parentales conflictuelles », qui véhiculent les théories de Gardner. Le substrat de la théorie du SAP existe donc toujours aujourd’hui[4].

Quelques détails du syndrome d’aliénation parentale

Gardner expliquait que pour procréer, l’homme devait être agressif, et la femme soumise. Selon lui, elle aimait d’ailleurs se faire battre. C’était « le prix à payer pour recevoir du sperme »[5]. Il était pro-pédophilie[6]. C’était d’ailleurs pour lui une simple forme de sexualité. Par la suite, il est revenu sur ses propos. Mais dans sa théorie, plus on sexualise un enfant tôt, plus il est capable de transmettre son patrimoine génétique.

Aussi, il considérait que si l’enfant était victime d’agressions sexuelles, c’était en partie parce qu’il avait séduit l’adulte avant l’acte[7].

Lorsque l’on fait de la recherche, on s’intéresse au contexte dans lequel les notions scientifiques sont nées. Ici, il n’y a pas de doutes, le biais pro-pédophile de Gardner est sans appel.

Dans sa théorie, il expliquait que les femmes avançaient de fausses accusations de violences sexuelles. La logique derrière cela est qu’elles avaient, selon Gardner, une empreinte traumatique et voyaient donc les hommes comme excessivement agressifs. Ainsi, elles inventaient à tout bout de champ des accusations d’agressions, de violences sexuelles, qu’elles transmettaient à leurs enfants. Il ne fallait donc pas non plus croire les enfants dans un contexte de séparation, parce qu’ils ne faisaient que relayer ce que leur mère leur disait. Il était d’ailleurs conseillé de battre les enfants qui racontaient ce genre d’histoires.

Impact sur les victimes

La problématique de cette théorie est qu’elle parle quand même à certaines victimes. Quand les mères voient que leurs enfants se retournent contre elles et se mettent à reproduire la violence sur elles, les victimes viennent dire que les enfants sont aliénés par leur père. Sauf que l’enfant, au bout d’un moment, va constater la toute puissance de l’agresseur. C’est pour cela qu’il va se lier à l’agresseur. Il ne va plus écouter ses besoins, ses émotions, pour être contre le parent victime, pour lui-même se protéger. Ce n’est donc pas une question d’aliénation parentale.

Quand on regarde la théorie de Gardner, fondateur de la théorie du SAP, si on va un peu plus loin que ce qu’il dit, on comprend que le parent violent arrive à influencer l’enfant de façon indirecte ou directe contre son parent victime. L’enfant, pour être plus en sécurité, aura donc tendance à se lier avec le parent agresseur.

Selon Marie Denis, psychologue belge spécialiste de la question, à partir de 7 ans, l’enfant va commencer à essayer de trouver des mécanismes de défense pour s’adapter à la situation violence, surtout si la violence n’est pas nommée. Il va donc souvent choisir de s’allier à l’agresseur pour survivre. Le processus prend racine sur un terrain où les relations existantes ne sont pas saines. L’enfant témoin va avoir du mal à nommer ses émotions, à les identifier. Comme personne ne lui montre ce qui ne va pas, il va choisir de se lier à l’agresseur. C’est pour cela que dénoncer les violences est également important.

Grille d’analyse du Syndrome d’aliénation parentale

L’aliénation parentale n’existe pas sous la forme que Gardner propose. Evidemment, certains parents manipulent leurs enfants. Mais la théorie qui existe derrière l’idée de Gardner n’a pas de sens. Gardner propose un outil d’analyse pour voir s’il y a un SAP ou pas[8], mais c’est globalement la même grille que pour voir si un enfant est victime de violences sexuelles.

Il est également intéressant de se dire que la grille d’analyse proposée est appliquée sur l’enfant pour voir si le parent est aliénant. C’est tout de même étonnant d’analyser quelqu’un sans lui poser les questions directement. Pour éviter de rencontrer cette problématique, certains adeptes du SAP vont avoir une approche plus systémique et vont parler de comportement aliénant. Ils vont alors lister toute une série de comportements aliénant, qui sont les mêmes que ceux listés par Gardner. Or, ce sont des comportements que peut avoir un parent protecteur.

Ils vont par exemple déceler que le parent protecteur dénonce que l’autre parent a un comportement problématique. Il parait logique, selon nous, qu’une mère qui voit que son compagnon ou ex-compagnon est alcoolique ou violent dénonce ces actes. Voir s’il y a dénonciation n’est donc pas un outil d’analyse valable. On ne peut pas savoir s’il y a manipulation ou non avec ces déclarations.

D’autres grilles d’analyse existent pourtant. Celles pour détecter la mémoire traumatique, le syndrome de stress post traumatique par exemple. Ces théories, quant à elles, sont reconnues par la communauté scientifique.

Principe de base du SAP : les femmes traumatisées

Il est également intéressant de se demander comment les femmes peuvent être naturellement traumatisées ? On ne nait pas traumatisé. Pour qu’un traumatisme arrive, il faut vivre une situation que l’on perçoit comme extrême, violente. La théorie de Gardner considère pourtant les femmes comme traumatisées, ce qui engendre le syndrome d’aliénation parentale. Rien que son idée de base n’a donc pas de fondement logique. Il ne peut y avoir de traumas sans violence perçue.

Le syndrome d’aliénation parentale en Belgique

Cette théorie insensée est toujours appliquée en Belgique en 2021. L’hébergement égalitaire est d’ailleurs basé sur le principe d’éviter l’aliénation parentale. Bien sûr, la garde partagée peut être une solution plus que logique dans beaucoup de situations. Mais pourquoi avoir une garde partagée dans une situation où un des parents est violent, où l’enfant est violenté, mais finit quand même chez son parent agresseur ? C’est incroyable que des décisions soient prises en Belgique sur la base de ce syndrome.

Aujourd’hui, quand une femme dénonce des violences sexuelles ou physiques que son enfant subit, on l’accuse très vite d’aliénation parentale. Après cela, les mères peuvent perdre rapidement la garde de leurs enfants parce qu’on les considère comme aliénantes, alors qu’elles essayaient seulement de protéger leurs enfants. Avec d’autres associations de terrain, nous avons suivi plus d’une centaine de cas de mères qui ont perdu la garde de leurs enfants à cause du SAP.

Le SAP à l’international

Un article français appelé « Le juge aux affaires familiales face au syndrome d’aliénation parentale », a été écrit par Marc Juston dans le Journal du droit des jeunes[9]. En septembre 2011, il définit le SAP comme un dénigrement systématique de la part d’un enfant contre l’un de ses parents. On ne parle pas de dénigrement injustifié, comme cela peut arriver. Là, dès qu’un enfant dénigre un parent, c’est de l’aliénation parentale. Pourtant, nommer les comportements violents de quelqu’un, dire qu’il est alcoolique, violent, etc., ce n’est pas de l’aliénation, c’est simplement une description. Nommer les comportements d’une personne, sa maladie, ce n’est pas la dénigrer.

Bien que, comme dit précédemment, au niveau européen[10] et international, le SAP est un concept contesté, et que ces théories sont considérées comme des théories anti-victimaires sans aucun fondement, il y a quelques mois, les magistrats belges ont été formés au SAP pendant un séminaire de plusieurs heures, où des « experts » du SAP sont intervenus sans aucune contradiction.

Ce syndrome vient faire écho aux représentations que l’on a des femmes. On entend d’ailleurs que les hommes sont violents physiquement mais les femmes exercent une violence psychologique. Les femmes sont des sorcières menteuses, manipulatrices, qui vont blesser leurs ex en inventant de fausses allégations à leur égard.

Parler de SAP en tournant autour du pot

Les défenseurs du SAP n’hésitent donc pas à avancer des propos et stéréotypes sexistes. Selon Jean-Emile Vanderheyden, dans 70% des cas, c’est la mère qui est aliénante. Ensuite, il vient induire une confusion entre conflit et violence. Pour les défenseurs du SAP, il n’y a pas de violence. Ça n’existe pas. Il n’y a que des conflits. Par après, il met l’accent sur le syndrome de Médée. Ce syndrome traduit qu’une femme abandonnée par son mari réduit son enfant à un objet de vengeance. Il évoque également le syndrome de Münchhausen par procuration.

L’idée autour du syndrome d’aliénation parentale et autres théories du même genre est de diffuser un maximum de stéréotypes sexistes. Ceci est fait pour ne plus comprendre la différence entre conflit et violence. On va alors parler de conflit avec violence par exemple. Certains vont jusqu’à dire que des conflits peuvent générer un syndrome de stress post traumatique. Cependant, dans les faits, c’est la violence qui crée un syndrome de stress post traumatique. Tout cela permet de brouiller les pistes. Ainsi, la victime de violences ne pourra jamais faire valoir son point de vue. Il faut se méfier du concept de SAP et de tout ce qui tourne autour de lui.

Dénoncer les violences faites aux enfants

Si vous allez dénoncer les violences que votre enfant subit et que l’on vous répond que vous êtes trop fusionnelle, que vous vous imaginez des choses, vous êtes probablement devant quelqu’un qui est pro SAP. Il ne vous entendra donc pas, même s’il ne vous dira pas directement qu’il est pro SAP.

Dans la convention d’Istanbul, on interdit le recours à la médiation lorsqu’il y a de la violence, alors qu’en cas de conflit, cela peut faire des miracles. Mais en cas de violence, la médiation ne peut pas fonctionner car l’agresseur aura toujours une position supérieure.

Marc Juston, dans l’article cité plus haut, explique que le premier devoir de chaque parent est de respecter la place de l’autre parent. Le conflit entre parents ne doit pas ressortir devant l’enfant. Donc, pour extrapoler, même si l’autre parent viole votre enfant, il faut d’abord respecter l’autre parent, pas sortir l’enfant de la situation. Tant que ces idées font partie du milieu juridique, les choses ne pourront pas avancer.

Fausses accusations

Ceci explique pourquoi Femmes de droit – droit des femmes milite pour que l’on croit les victimes. Seules 2% des accusations de violences sexuelles sont de fausses allégations[11]. Ceci signifie que 98% des accusations sont fondées. Pourquoi donc penser que la majorité des accusations sont des manipulations ?

Dissociation traumatique

La dissociation peut expliquer que l’enfant ne puisse pas réagir aux agressions, mais le processus d’alliance et d’identification à l’agresseur se fait souvent dans le temps. Il est vraiment en lien avec la perception de l’enfant avec l’agresseur. Il est évident qu’un enfant a besoin de sentir que les adultes qui l’entourent sont là pour l’aider, pour le protéger, le nourrir. L’enfant va donc aussi intégrer des schémas relationnels dans lesquels il n’y a pas de négociation : l’un domine, l’un subit. Parfois, l’enfant va subir lui aussi et donc se retrouver dans un schéma d’abnégation de lui-même. Il va bien se rendre compte qu’un parent va plus prendre soin de lui que l’autre.

Conclusion

Nous venons d’expliquer en quoi le syndrome d’aliénation parentale était problématique. Comme décrit précédemment, une grande partie des professionnel-le-s qui pourraient prendre une plainte de violence d’un parent sur l’enfant sont formé-e-s au SAP. Néanmoins, il existe des associations qui peuvent vous aider, vous conseiller pour protéger vos enfants. Si vous faites le choix d’appeler la police, certains pourraient bien vous recevoir, nous ne mettons pas tout le monde dans le même panier.

Par contre, si vous êtes mal reçu-e ou que vous souhaitez récolter des informations ou déposer votre témoignage auprès d’autres professionnel-le-s, vous pouvez faire appel à ces différentes associations : Femmes de droit – Droit des femmes (+32 474 13 85 87 ou +32 494 24 95 38) , SOS inceste (02 646 60 73), Vie féminine (numéros différents dépendant des antennes, renseignez-vous sur leur site internet).

Encore une fois, nous ne prétendons pas détenir la vérité, et si vous avez des éléments à nous apporter, n’hésitez pas à nous les faire parvenir. Nous sommes toujours intéressées par l’idée d’apprendre, mais refusons néanmoins les théories anti-victimaires.

Marie Darcis


Notes

[1] Gardner, R. A. (1998). The parental alienation syndrome. 2nd. Cresskill, New Jersey: Creative Therapeutics, 1-5.

[2] https://reseauiml.wordpress.com/2019/08/05/non-lorganisation-mondiale-de-la-sante-na-pas-reconnu-lalienation-parentale/

[3] https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2021-0406_FR.html

[4] Van Gijseghem, H., VANDERHEYDEN, J. E., De Becker, E., & Séguier, D. (2021). Les séparations parentales conflictuelles: Conséquences enjeux et prises en charge\t\n\n. De Boeck Supérieur.

[5] Gardner, R. A. (1998). The parental alienation syndrome. 2nd. Cresskill, New Jersey: Creative Therapeutics, 1-5.

[6] Gardner, R. A. (1992). True and false accusations of child sex abuse (pp. 639-680). Cresskill, NJ: Creative Therapeutics.

[7] Gardner, R.A. (1986), « Child Custody Litigation: A Guide for Parents and Mental Health Professionals », p 93

[8] https://www.cairn.info/revue-journal-du-droit-des-jeunes-2002-8-page-38.htm

[9] Juston Marc, « Le juge aux affaires familiales face au syndrome d’aliénation parentale : comment le repérer et le gérer », Journal du droit des jeunes, 2011/7 (N° 307), p. 19-27. DOI : 10.3917/jdj.307.0019. URL : https://www.cairn.info/revue-journal-du-droit-des-jeunes-2011-7-page-19.htm

[10] https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2021-0406_FR.html

[11] http://femmesdedroit.be/informations-juridiques/abecedaire/fausses-accusations-de-violences-sexuelles/

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